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Natureza humana

 ISSN 1517-2430

Nat. hum. v.11 n.1 São Paulo jun. 2009

 

ARTIGOS

 

Continuité d’être et primitive agony: le bébé winnicottien et le psychotique*

 

Continuidade e agonia primitiva do ser: Winnicott e o bebê psicótico

 

Continuity and primitive agony of being: Winnicott and the baby psychotic

 

 

Jeanine Chamond**

l’université de Paris X – Nanterre, l’Ecole Française de Daseinsanalyse.

Endereço para correspondência

Mais où rencontrer l’enfant?
Le corps de l’enfant revient au pédiatre.
Son âme, aux hommes de la religion.
Sa psyché appartient aux psychanalystes.
Son intellect aux psychologues.
L’esprit est pour les philosophes.
Le psychiatre veut des troubles mentaux.L’hérédité va aux généticiens.
L’écologie réclame sa part au milieu social.
Les sciences sociales étudient le dispositif familial,
sa relation à la société et sa relation à l’enfant.
Les sciences économiques examinent les tensions
et les contraintes dues aux besoins incompatibles.
La loi s’interpose pour réguler et humaniser
la vengeance publique à l’égard des comportements anti–sociaux.

D. W. Winnicott, La nature humaine

 

 


RESUMO

Neste artigo pretende–se apresentar a especificidade da teoria psicanalítica por Winnicott, considerando que seu pensamento e sua prática estão atravessados por intuições e questões fenomenológicas que são próximas da Daseinsanalyse, tais como : continuidade de ser, mãe suficientemente boa e Holding, transicionalidade e área da ilusão.

Palavras–chave: Daseinsanalyse, Winnicott, Continuidade de ser e Holding, Mãe suficientemente boa, Transicionalidade e Área da ilusão.


RÉSUMÉ

L’objectif de cet article est de présenter la spécificité de la théorie psychanalytique chez Winnicott, étant donné que sa pensée et sa pratique sont traversées d’intuitions et de questions phénoménologiques qui sont proches de la Daseinsanalyse, à savoir: la continuité d’être, la mère suffisamment bonne et le Holding, le transitionnel et l’aire de l’illusion.

Mots–clés: Daseinsanalyse, Winnicott, Continuité d’être et Holding , Mère suffisamment bonne, Transitionnel, Aire de l’illusion.


ABSTRACT

The purpose of this article is to present the specificity of Winnicott’s psychoanalytical theory, taking into account the fact that throughout his theory and practice are found intuitions and phenomenological issues which are close to the Daseinanalysis, such as the continuity of being, the good–enough mother and Holding, transitionality and the area of illusion.

Keywords: Daseinanalysis, Winnicott, Continuity of being and Holding, Good–enough mother, Transitionality, Area of illusion


 

 

Entrer dans la psychanalyse par la porte de la pédiatrie, telle est peutêtre la voie royale qui a permis à Winnicott d’inventer une réflexion et une pratique psychanalytiques audacieuses, paradoxales, insolites, voire insolentes, en tout cas peu orthodoxes au regard de la doxa freudienne; et selon R. Roussillon, bien plus rebelles que ce que l’on a voulu admettre dans les écoles psychanalytiques. Mais si voie royale il y a, elle a été facilitée par la longue analyse personnelle qui a permis au pédiatre de retrouver en lui l’Enfant, l’enfant joueur, créatif et vulnérable. De fait, le parcours intellectual et clinique de Winnicott est un aller retour constant du nourrisson à l’adulte, de la structure enfant/environnement maternel à la relation thérapeute/patient, du bébé réel observé dans le giron maternel au bébé reconstruit dans la cure de l’adulte, des catastrophes infantiles précoces à leurs effets délétères dans les psychoses adultes et dans la normalités pathologiques du Faux Self. Selon P–L. Assoun (2006), Winnicott qui s’est attaché à penser l’enfant, est arrivé à penser comme l’enfant. Fondamentalement, il n’est ni freudien, ni kleinien, ni lacanien. Sa réflexion porte sur l’Infans, celui qui n’a pas le langage. Le rôle secondaire qu’il accorde à la sexualité enfantine, au complexe d’OEdipe qui ne jouerait que pour les névrosés, as compréhension de la relation d’objet, l’éloignent de Freud. Le père, maintenu dans les coulisses jusqu’ à ses écrits de 1955 (Duparc, 2005, pp. 71–91)1, la thématique du langage quasiment absente, la focal portée sur les besoins au détriment du désir, fondent les reproches des lacaniens. Son premier inspirateur, c’est Darwin et l’origine des espèces. Il en retire la conviction que le bébé humain est porteur d’un potentiel inné de développement vers la maturation, la santé et la créativité, qui doit rencontrer un environnement favorable pour se développer. “Un bébé qui n’a pas créé le monde.... n’a pas d’avenir’’ écrit Winnicott dans La nature humaine (Winnicott, 1988)”.

Son oeuvre fut longtemps poliment ignorée. Qualifié pêle–mêle de poète, de rebelle, de philosophe, d’anthropologue pragmatique de l’infantile (P–L. Assoun), de psychologue développementaliste (G. Guillerault), de psychanalyste contestable – et sans doute tout cela est–il un peu vrai –, Winnicott est dans le monde de la psychanalyse un peu comme le schizophrène perplexe de Blankenburg (1991), celui qui s’interroge sur lês évidences naturelles qui ne font problème qu’à ceux à qui elles manquent: Qu’est–ce que vivre et se sentir vivant? Qu’est–ce qu’avoir la sensation d’être réel et percevoir le monde comme réel? Quel est le lieu où nous vivons? Enquoi consiste la vie même? Telles sont quelques unes des questions naïves, redoutables, essentielles, auxquelles le confrontent les psychotiques et lês enfants. Questions qu’il choisit de prendre au sérieux pour en faire ses axes épistémologiques. Pour la philosophe B. Dessain (2007, p. 4), en affirmant les fondements a–pulsionnels de l’être, Winnicott est le préhistorien “d’avant la pulsion’’, qui interroge inlassablement l’entre–deux du nouveau–né et de samère, l’entre–deux du monde intérieur et du monde extérieur, l’entre–deux dusujet et du monde partagé, et les conditions de possibilités du sujet humain. A. Green note qu’il a transformé la psychanalyse des objets en psychanalyse de l’espace (2005). Au–delà de l’imagerie qui le montre volontiers en bon papa, à quatre pattes comme le roi Henri IV en train de jouer avec ses enfantspatients, ou identifié à une mère suffisamment bonne réparatrice, derrière l’homme tranquille et débonnaire à l’empathie géniale et à l’humour anglais, se dessine un autre Winnicott: celui qui, à explorer les confins de l’être humain et les limites de l’analysable, rencontre des extrêmes et les assume.

Mais si nous l’invitons aujourd’hui à l’Ecole Française de Daseinsanalyse, c’est parce que sa pensée et sa pratique sont traversées d’intuitions et de questions phénoménologiques que nous aurons à dégager, à préciser, à discuter au cours de cette journée; même si, disons–le clairement, Winnicott ne se revendique en rien phénoménologue; à ma connaissance, le terme même de phénoménologie est absent de son corpus. Citons J. B. Pontalis: “Avec Winnicott, le mot d’être, de being, parfois écrit en majuscule, fait son entrée dans la psychanalyse; et c’est bien commodément éluder la question que cette émergence nous pose que de l’évacuer sous la désignation, péjorative, de mysticisme” (Pontalis, 1977a). Pour B. Dessain, “l’oeuvre de Winnicott invite à suivre un cheminement. Nous nous trouvons sur la ligne de crête du partage entre psychanalyse et philosophie: la première ne privilégie plus la libido, et la seconde risque bien d’être au seuil du logos” (Dessain, 2007, p. 4).

Voilà qui ne va pas alléger la charge qui nous incombe, celle de commencer cette journée par présenter Winnicott à ceux qui ne lê connaissent pas, dans le but de déployer en quelque sorte le paysage winnicottien où les autres communications vont prendre place. La première partie donnera quelques repères biographiques, historiques, épistémologiques de l’époque. Puis sera proposé un petit glossaire de quelques notions–clefs de l’auteur: la subjectivité de notre choix será complétée par les intervenants de la journée. Les notions choisies sont propres à éclairer les particularités du bébé winnicottien et la technique thérapeutique de l’auteur. La dernière partie tentera de préciser as compréhension de la psychose et de l’illustrer par un vignette clinique.

 

1. Repères biographiques, historiques, épistémologiques

Donald Woods Winnicott est né 1896 dans une famille décrite comme prospère et heureuse, auprès de parents attentifs. Son père est le Lord maire de Plymouth, et il a eu beaucoup de mères, sa mère, ses grandes soeurs, des “nanys”, plus une ribambelle de cousins pour partager ses jeux. La famille partage l’amour de la musique: bref, un environnement facilitant dont on verra l’importance dans sa pensée. Disons au passage que des recherches récentes remettent en question la version idéalisée de cette enfance, mais on ne s’y attardera pas (Rabain, 2004, pp. 45–69)2. Après des études de médecine et de pédiatrie pendant la première guerre mondiale, il devient en 1923, à 27 ans, médecin assistant dans deux grands hôpitaux d’enfants de Londres. Suite à la lecture d’un livre de Freud, il entreprend la même année, en 1923, une psychanalyse qui va durer dix ans avec James Strachey, le traducteur de Freud, puis avec la kleinienne Joan Rivière. En 1940, lors des bombardements de Londres, il dirige avec John Bowlby, le célèbre théoricien de l’attachement, l’évacuation des enfants, mettant en garde les autorités contre les dangers des separations au sein des familles. Il travaille dans les institutions prenant en charge les enfants de la guerre avec une assistante sociale, Clare Britton, qui deviendra sa seconde épouse en 1951. Analysée par M. Klein, Clare Winnicott devint psychanalyste tout en poursuivant une brillante carrière d’enseignante. Ils n’auront pas d’enfants. Winnicott exerce la psychanalyse à Londres pendant 40 ans dans ses consultations hospitalières et à son cabinet de Chester Square; alors qu’il aurait aimé, confiait–il à ses proches, être un humoriste de cabaret. Lui qui se disait “croyant comme un enfant’’ tout en sachant parfaitement que Dieu n’existe pas, il meurt en 1971 d’une crise cardiaque, en ayant écrit peu avant: “Mon Dieu, que je puisse être vivant quand je mourrai !”.

Dans les années 30 et 40, la psychanalyse d’enfant anglaise est florissante autour de deux grands noms: Anna Freud, réfugiée à Londres depuis 1939 avec son père, et Mélanie Klein, arrivant de Berlin. Toutes deux ont leurs disciples, trop soumis au grès de Winnicott, et des points de vues passionnels et conflictuels sur la pratique et la théorie, sans jamais aller toutefois jusqu’à la scission. Si A. Freud bénéficie d’une légitimité tutélaire, c’est M. Klein qui règne en maître à penser et gouverne la psychanalyse anglaise. Les travaux de Winnicott ne sont reconnus ni par l’une ni par l’autre, A. Freud lui reprochant d’être kleinien, et M. Klein mesurant bien qu’il ne l’était pas. Celle–ci lui demande quand même d’analyser son propre fils, à condition qu’il accepte d’être supervisé par elle; Winnicott refuse. De fait, ses relations avec M. Klein sont longues et complexes. à ses débuts, de 1930 à 1940, il est influencé par elle, et ne cache pas l’admiration qu’il lui porte, sans l’avoir tout à fait comprise (Winnicott, 1989). Puis il trace son chemin propre, non sans attendre d’elle, toute sa vie, une reconnaissance qui ne vint jamais. Entre les annafreudiens et les kleiniens, une 3eme voie se constitue, le Middle Group, qui se nomme aussi “Les indépendants”. Winnicott, Balint et M. Milner en font partie, pour ne citer qu’eux. Ils ne se reconnaissent aucun chef de file. Cette troisième voix, c’est une sorte d’espace transitionnel entre le monde quasi solipsiste des objets internes des kleiniens et l’adaptation au milieu éducatif des annafreudiens. Les théories du Middle Group se caractérisent par leur éclectisme, leur pragmatisme, leur rejet de tout dogmatisme, et leur centration sur la clinique. Car, disait Winnicott, si la théorie n’arrive pas à rendre compte de la clinique, c’est la théorie qu’il faut changer, et la vie est mouvement et non fabrication de catégories. Avec Winnicott, selon A. Green, pour la première fois, la pratique psychanalytique est en avance sur la théorie et la met devant ses responsabilités.

On connaît sa célèbre boutade: “un bébé, ça n’existe pas !”; ça n’existe pas, en effet, sans la mère qui lui donne des soins: à la période d’absolue dépendance, il n’y a pas au sens littéral d’individu, ni de relation, ni d’échange: un nourrisson au sein prend une part de lui–même qu’une mère offre à une partie d’elle–même. L’ensemble environnement/nourrisson contient un être–au–monde en puissance. Si sa pratique de pédiatre l’engage à se démarquer de la pédiatrie purement organique de son temps, sa pratique de la psychanalyste l’amène à remettre en question la référence essentielle au complexe d’OEdipe qui prévalait dans ces années–là dans les soins psychologiques des enfants. En effet, l’OEdipe, c’est vers 3 ou 4 ans, alors que d’innombrables histoires de cas témoignent que les tous premiers mois, voire les tous premiers jours, de la vie du nourrisson peuvent être décisifs; alors que Freud, note–t–il, considérait que la situation de maternage précoce allait de soi, à partir de quoi il put concevoir son dispositif d’analyse des névroses. L’objet d’étude de Winnicott, c’est l’in–fans et sa mère pris dans un immense problème humain: celui d’atteindre la maturité en dépit des obstacles. “En choisissant d’aborder l’étude de La nature humaine par la question du développement...., j’espère pouvoir rendre clairement la façon dont, à partir d’une fusion primaire entre l’individu et l’environnement, quelque chose fuse, l’individu mettant en jeu ce qu’il veut et devenant capable d’exister dans un monde qui ne veut rien” (Winnicott, 1988).

L’oeuvre, selon Pontalis (1977a, p. 176), est à la fois ingénue et savante, charnelle et abstraite. Elle est d’abord très personnelle, animée d’une liberté rare, marquée par la spontanéité, l’humour, le jeu, et la fuite de tout dogmatisme qui s’érige en savoir absolu. Ecrite pour des non–spécialistes, elle est simple; mais en apparence seulement. Elle peut être parfois d’une subtilité redoutable, malgré une langue claire, très clinique, qui évite tout jargon technique. Il arrive aussi que l’on reste médusé devant ses intuitions fulgurantes, ses propositions paradoxales, ses abstractions vertigineuse, voire aussi des obscurités délibérément assumées. Les grands winnicottiens disent même que c’est un auteur difficile (Tels André Green). Pourtant l’homme est présent à chaque page, peu pressé de théoriser, réservé dans ses interprétations, pour laisser les choses être ce qu’elles sont et se déployer naturellement. Son travail n’est pas ouvertement polémique, mais penser entre, et parfois contre, Freud et Klein l’amène sans doute à des contorsions et des esquives. Sa pratique se marque par une confiance “dans la tendance naturelle à la santé”, loin de tout zèle thérapeutique. Rien ne lui est plus étranger que la pratique de l’analyse pour l’analyse. Il implique autant qu’il le peut les parents et les éducateurs dans le soin, en particulier pour tolérer et satisfaire les besoins de régression des enfants. Il conçoit la psychothérapie comme un jeu commun de création, qui doit savoir s’adapter à chaque cas. R. Roussillon écrit:

Si Winnicott pense que chaque être doit créer le monde qu’il trouve dans son environnement, s’il pense que c’est ainsi qu’on s’y rend présent et créatif, il applique ce même précepte à sa manière d’habiter la psychanalyse. Il n’applique pas la psychanalyse aux troubles limites de l’identité et du narcissisme, il ne l’applique pas comme on dit en mathématique qu’on applique une formule, il transforme la psychanalyse pour qu’elle s’applique aux troubles de l’identité et du narcissisme et à ce que ceux–ci comportent de question essentielle pour chacun (Roussillon, 1999, p. 13).

14. Ses collègues lui reconnaissent unanimement un don extraordinaire pour rencontrer les enfants. Notons qu’il est sans doute le premier psychanalyste à remercier ses patients de l’avoir payé pour l’instruire. Il a aussi une longue pratique de formateur auprès des éducateurs et travailleurs sociaux, et fait pour les parents des causeries à la radio, ce que reprendra en France F. Dolto. Le recueil de sa correspondance, paru sous le titre Lettres vives (Winnicott, 1988), témoigne de son engagement dans son époque: critiques violentes des méthodes psychiatriques de son temps, leucotomies et électrochocs; interpellation des politiciens dans des lettres au Times sur les dangers de l’étatisation des services médicaux; conférence sur la démocratie décrivant “ces antisociaux déguisés qui s’identifient à l’autorité de chefs socialement immatures”. Enfin sa correspondance atteste que l’homme, décrit comme charmant, peut parfois se montrer féroce dans sa sincérité à dire ce qu’il pense, aussi bien au ministre qu’à ses collègues psychanalystes.

Si Winnicott se dit parfois freudien, il s’éloigne de Freud sur de nombreux points. A la théorie des pulsions et du développement de la sexualité infantile, qu’il ne renie pas, avec Balint, Bowlby, Fainbairn, il privilégie l’amour d’objet primaire qui n’est lié pour lui à aucune zone érogène. Il évite la métapsychologie freudienne – il disait de lui–même: “je suis nul en métapsychologie” – et avoue dans une lettre à Jones ses inhibitions à lire Freud. Dans ses quelques pages biographiques, il écrit que s’il est un produit de l’école freudienne, il est loin de partager tous ses points de vue et cela n’a aucune importance (Winnicott [1950], 1981, p. 24). Il pense que le fondement de l’être est a–pulsionnel; quand il y a pulsion chez Winnicott, c’est le plus souvent une pulsion de vie au sens le plus large du terme, une pulsion plus aristotélicienne que freudienne, comme puissance cherchant son actualisation. L’agressivité et les instincts sont au service de la vie, de la croissance de l’être, de la créativité. Il ne croit pas à l’instinct de mort de Freud et M. Klein. En opposition à celle–ci, qui centre sa théorie sur le monde intérieur fantasmatique du nourrisson, Winnicott construit la sienne en amont sur la mère–environnement réelle. “Il n’y avait alors que les psychanalystes pour savoir que tout existait sauf l’environnement”, écrit–il ironiquement dans ses notes biographiques (Winnicott, 1989). Il doit d’ailleurs affronter durement sa seconde analyste, J. Rivière, fervente kleinienne, pour pouvoir affirmer en toute indépendance son point de vue sur la mère réelle. Selon le témoignage de A. Green (2005, pp. 24–32), son oeuvre est introduite en France dans les années 60 par lui–même et V. Granoff. Elle est reçue d’abord de façon réactive, en opposition à l’abstraction envahissante du lacanisme: cet auteur anglais qu’on pouvait enfin comprendre fut, pour cette même raison, apprécié des uns et méprisé des autres. J. Lacan fait publier son célèbre article sur l’Objet Transitionnel dans la revue La Psychanalyse, et dans une lettre datée de février 1960, Winnicott l’en remercie. Dans son séminaire de 1959 (Lacan, 1994), Lacan fait de l’objet transitionnel un précurseur de son célèbre objet a. Il faut attendre les années 70 pour qu’il soit traduit en français. Beaucoup d’analystes estiment que ses apports à la discipline ne sont pas encore complètement explorés. “Ce que j’ai dit prend l’allure d’un île, écrivait–Winnicott, les gens doivent y mettre du leur pour y aller” (Winnicott, 1989).

 

2. Petit lexique winnicottien

Constituer un petit lexique du vocabulaire de Winnicott dans le temps imparti est un exercice forcément partiel et simplificateur. Sur la trentaine de termes habituellement proposés, il m’a fallu choisir 6 notions, sans pourvoir restituer toutes les nuances, les reprises, l’approfondissement et les inflexions apportés par l’auteur d’un texte à l’autre, ce qui leur donnent parfois un contour fluctuant. Sans aucun doute, chacune d’elles mériterait un article entier. Seront ici esquissées les notions de continuité d’être, mère suffisamment bonne et Holding, le transitionnel et l’aire de l’illusion, la créativité, le squiggle game et du Self.

2.1. La continuité d’être.

La continuité d’être ou continuité d’existence du bébé est assurée par la constance de l’environnement maternel: c’est la toile de fond de toute la pensée winnicottienne. L’auteur écrit:

Le fondement de toutes les théories du développement de la personne humaine réside dans la continuité de la ligne de vie qui débute probablement avant la naissance de l’enfant; la continuité comporte l’idée que rien de ce qui fait partie de l’expérience de l’individu n’est ou ne peut être perdu pour lui, même si, pour des motifs variés et complexes, cela peut devenir effectivement inaccessible à la conscience” mother (Winnicott, 1968, p. 42).

Grâce à la permanence des soins maternels appropriés, “le potentiel inné du nouveau–né devient une continuité d’être” (Winnicott, 1960, pp. 358–378) ou “fait l’expérience d’une continuité d’être”; laquelle sous–tend son sentiment d’être réel et d’être toujours le même à travers ses expériences variées. – Et l’on sait combien la phénoménologie des psychoses, de la schizophrénie en particulier, explore la défaillance de cette continuité –. Ce sentiment fonde le Self, cet état unifié qui constitue un Je suis. Le sentiment d’exister est le centre de gravité de l’être, qui d’abord se situe dans l’entre deux mère–enfant. Winnicott remarque d’ailleurs à plusieurs reprises qu’on ne sait pas si le bébé vit dans son propre corps ou dans le visage de sa mère. Il écrit: “Après exister, faire, et aussi qu’on nous fasse quelque chose. Mais d’abord exister” (Winnicott, 1971g, pp. 91–119). La continuité d’être exige que le rythme de croissance et d’expérience du bébé soient respectés par u n e mère suffisamment bonne. La continuité d’existence, assurée par la permanence de l’environnement maternel, instaure le fondement de la confiance basale en le monde, qui permet au bébé de se détendre et de s’abandonner dans la sécurité. La continuité d’être sous–tend toute la structure processuelle de l’être, intègre la nouveauté dans la permanence et travaille dans le mouvement du devenir au maintient unifié de soi qu’il appelle le Self (Chamond, pp. 245–251).

2.2. La mère suffisamment bonne et le Holding

La fameuse mother good enough, pilier du monde winnicottien, est la mère ordinaire, dévouée mais non parfaite, qui au début de la vie du bébé est en empathie étroite avec lui grâce sa préoccupation maternelle primaire (Winnicott, 1956). Mais la mère doit peu à peu, au fur et à mesure de ses progrès, se désadapter pour favoriser son indépendance. Mais il faut une mise de départ irréductible de fiabilité et de permanence pour que l’enfant arrive à admettre, comprendre, tolérer et même prévoir les micros carences de l’environnement, qu’il convertira en occasions d’évoluer. La mère est dispensatrice des soins dont le nourrisson a besoin, soins que Winnicott différencie en Holding et Handling. Le Holding, littéralement la tenue, le soutien, le portage, est la façon de tenir et de contenir le bébé, en continuité avec l’utérus maternel. Le centre de gravité du bébé n’est pas encore dans son corps propre et “l’amour vient d’en bas” écrit Winnicott dans La nature humaine. Le Holding, couplé au Handling, est le maniement, l’aspect technique des soins. Le tout premier Holding est physique, c’est le ventre maternel et puis ses bras, et psychique grâce au souci qu’elle a de lui et au plaisir éprouvé à s’en occuper; – c’est son aptitude, comme disent familièrement les puéricultrices, à “le porter dans sa tête”–. Puis le Holding est le fait de se sentir bien tenu dans les bras de quelqu’un quand le bébé est “porté avec dévotion”. Enfin il est relayé par le soutien familial, ou à défaut par un Home d’accueil. Le Holding suffisamment bon assure au bébé une présentation continue du monde, base du sentiment de continuité d’être, de confiance en le monde et d’existence personnelle. L’acquisition de la confiance peut s’observer dans la petite psychologie de la vie quotidienne, me semble–t–il, quand par exemple l’enfant debout sur sa table à langer se jette dans les bras que lui tend sa mère; s’il se lance ainsi dans le vide, c’est bien qu’il a l’absolue certitude que l’autre va le rattraper. Le Holding a pour fonction d’éviter la rupture de continuité de l’existence; il ne se remarque pas si tout va bien. S’il est défaillant, il produit un empiètement du développement, vécu comme une menace d’annihilation, laquelle n’est pas l’angoisse de mort, sans signification à ce stade précoce, ni la frustration théorisée par la psychanalyse. Le Holding évolue normalement d’abord vers la capacité d’être seul en présence d’autrui, gage de maturité et d’unité dans le développement, et qui suppose un autre présent qui ne demande et n’exige rien, dans une coexistence tranquille; ensuite la capacité à être seul 1958 (Winnicott, 1958a, pp. 325–333) qui n’est pas le solipsisme ni un isolement douloureux en perte des autres, mais une solitude pleine, habitée de soi–même, la vie intérieure et l’existence personnelle, où peut se déployer le Self secret.

2.3. Le transitionnel et l’aire de l’illusion

Winnicott est surtout connu en France pour le concept d’Objet Transitionnel (Winnicott, 14953c, pp. 7–39) 26 élaboré en 1951: le fameux “doudou’’, qui fait de l’auteur la star incontestée des crèches, est ce bout de chiffon ou de couverture auquel, entre 4 et 12 mois environ, le bébé s’attache passionnément pour sa fonction calmante, et qu’il suçote au moment de s’endormir. Victime de son succès et de bien des malentendus, l’objet transitionnel occulte le concept d’aire transitionnelle, ou d’espace potentiel, ou d’aire intermédiaire d’expérience, ou encore d’aire de l’illusion, – toutes ces formulations sont équivalentes –, dont l’objet n’est qu’un épiphénomène ou l’aspect visible de la transitionnalité. Par le concept de transitionnel, Winnicott répond à l’épineuse question de la construction de la réalité: refusant le dilemme entre l’interne et l’externe, il instaure entre eux la continuité en réhabilitant l’illusion. Il fait de l’illusion le préalable à l’objectivation. L’illusion est rien moins que la voie d’accès à la connaissance, dans un paradoxe que, dit–il, il laisse aux philosophes. Que le monde soit là avant nous, nous n’en savons rien en naissant: nous avons à créer le déjà–là du monde. La réalité externe doit en quelque sorte se taire pour nous laisser l’illusion omnipotente que, tel Dieu, nous créons le monde. Car c’est une tâche sans fin que d’accepter la réalité, que Freud appelle d’ailleurs l’épreuve de réalité. La réalité se constitue progressivement par la création d’un no–man’s–land entre le subjectif et ce qui est objectivement perçu. Le trouvé/créé est l’un des fameux paradoxes de Winnicott. Il faut le recouvrement de l’hallucination du sein qui manque par l’expérience du sein réel présenté au même moment, pour que le bébé ait l’illusion qu’une réalité extérieure existe, qui correspond à sa propre capacité de la créer. Le chevauchement de ce que le bébé conçoit et de ce que la mère apporte produit «un troisième monde’’, une zone intermédiaire entre la subjectivité et l’objectivité, une zone intermédiaire d’expérience, une zone tierce de compromis, à laquelle contribuent simultanément la réalité intérieure et la vie extérieure.

Cette aire n’est pas contestée car on ne lui demande rien d’autre sinon d’exister en tant que lieu de repos pour l’individu engagé dans cette tâche humaine interminable qui consiste à maintenir, à la fois séparées et reliées l’une à l’autre, réalité interne et réalité externe’’ (Winnicott, 1953c, p. 9).

L’espace potentiel est le lieu de l’expérience culturelle, “car nous ne pouvons recevoir l’héritage culturel, y contribuer et y trouver refuge que si nous avons d’abord eu un lieu pour y mettre ce que nous avons trouvé” (Winnicott, 1967, pp. 132–143). La religion, l’art, le jeu, la vie imaginaire, le travail scientifique, la capacité de croire en...., relèvent du transitionnel, comme aussi “les petites folies qui sont légitimes sur le moment selon le modèle culturel prévalant” (Winnicott, 1967, pp. 132–143). Dans l’espace de transitionnalité, la question de savoir ce qui est à moi et ce qui est à l’autre ne se pose pas parce qu’elle est recouverte d’un halo d’illusion de continuité. En se situant entre l’objet interne et l’objet externe, le transitionnel permet d’amortir les effets de la réalité externe et de réduire la dépendance à l’objet externe. L’espace potentiel est l’aire de repos pour se laisser–être et se laisseraller, dans la détente d’être “sans forme” dans un état transitoire de nonintégration, qu’il ne faut surtout pas confondre avec la désintégration psychotique. L’usage de l’objet ou les phénomènes transitionnels comme les gazouillis et le chantonnement du bébé au moment s’endormir, marquent une première séparation avec le maternel, le passage de la fusion à la relation proprement dite, et un premier pas vers la symbolisation. Le fait que l’objet transitionnel ne soit pas la mère est tout aussi important que le fait qu’ilreprésente la mère. Premier jalon vers la formation du symbole, il n’est pas encore un symbole car son poids d’être l’emporte sur son sens. F. Duparc écrit: “A la fois interne et externe, créé et trouvé, réel et hallucinatoire, l’objet transitionnel vient là où il y aurait autrement une pure décharge hallucinatoire, et un déplaisir qui rendrait la représentation mentale persécutrice” (Duparc, 2001, p. 170). La tâche ultime de la mère est de désillusionner progressivement l’enfant. Mais la désillusion n’est pas l’adaptation mature et définitive à la réalité et l’illusion n’est pas une forme moins mature d’être au monde. S’il faut en parler en terme de santé mentale, celle–ci réside dans la capacité de l’aller et du retour entre illusion et désillusion, dans la possibilité même du processus. A cet égard, on pourrait dire que le psychotique est celui qui ne se fait pas d’illusion; mais à ne pas se faire d’illusion, il semble voué à l’hallucination et à la persécution. Donc, le bébé winnicottien doit en quelque sorte se prendre pour Dieu, car ce n’est d’abord que ce qu’il crée qui a du sens pour lui; avant de pouvoir un jour, écrit l’auteur, “sentir qu’il n’est qu’une infime poussière dans l’univers”, et “ressentir l’humilité qui est le propre de l’individualité humaine” mére (Winnicott, 1968). Le transitionnel winnicottien a inauguré en sciences humaines toute la pensée de la tiercéité, reprise notamment par A. Green et l’analyse transitionnelle conceptualisée par R. Kaës.

En 1971, Winnicott écrit un bel article, “Le rôle de miroir de la mère et de la famille dans le développement de l’enfant” (1967c, pp. 153–162), sous l’influence du stade du miroir de J. Lacan. Dans ces dix pages, il y a à mon avis tout Winnicott: à la fois le creusement d’une évidence, la subtilité, la complexité, l’audace. L’évidence – pour le dire avec mes propres mots – c’est que le visage maternel est la Gestalt fondamentale de l’hominisation. Pendant la tétée, écrit Winnicott, le bébé regarde sa mère et son visage lui reflète ce qu’elle voit de lui et que donc il est. Il décrit “ces bébés torturés par la défaillance maternelle, qui étudient les variations de son visage pour en prévoir l’humeur, comme on scrute le ciel pour savoir le temps qu’il fait”. On comprend que le visage maternel est aussi une climatique: il transmet une Stimmung fondamentale, il dit en quelque sorte au bébé le temps qu’il fait dans leur univers commun: soleil, orage, ou, retenons le mot, dépression. Enfin il y a des visages maternels qui ne reflètent rien. Le vide. – On peut se référer à ce que A. Green théorisera en 1980 comme “la mère morte” (pp. 222–253), à savoir psychiquement morte pour son enfant parce qu’elle s’est abîmée dans le deuil ou la dépression –. Car pour Winnicott, la défaillance de l’environnement vient le plus souvent de la dépression de la mère. Selon ce qu’il voit dans le visage–miroir maternel, l’enfant en retire, à des degrés divers, le sentiment de se sentir réel ou le vécu de précarité de son être, l’unification ou la menace du chaos, l’ouverture au monde ou le repli protecteur, la capacité de créer ou la soumission à la réalité. Puis Winnicott fait une référence complexe aux tableaux du peintre Francis Bacon et à leur visage en torsion, que je ne reprendrai pas ici. Et puisqu’il faut avoir été regardé pour exister, comme toujours chez Winnicott, c’est au thérapeute de donner ce que la mère n’a pas pu offrir. Et il en retire rien moins qu’une redéfinition de la psychothérapie: plutôt que des interprétations astucieuses, savoir parfois regarder le patient de façon à ce qu’il fonde son être dans ce reflet de lui–même, qu’il y trouve de quoi établir son Self et se sentir réel. Dans cet article, l’auteur n’utilise pas les termes d’identification, de troubles du narcissisme, de transfert, etc. Il ne remet pas en cause la validité du stade du miroir de Lacan, dont le visage maternel serait finalement le précurseur; simplement il déplace le curseur en amont, dans sa contrée à lui, dans l’entre–deux mère/enfant.

2.4. La créativité

La créativité draine en elle la quasi totalité des notions clefs de Winnicott. Elle n’a rien à voir avec la sublimation freudienne de la sexualité, ou la réparation kleinienne. Elle fait partie du potentiel inné et nécessite pour s’affirmer l’illusion omnipotente et l’agressivité primaire. Elle nécessite que chacun accepte en soi la coexistence de l’élément féminin pur qui nous vient de l’entremêlement originaire avec la mère, et de l’élément masculin pur issu de la séparation d’avec elle (Winnicott, 1986h, pp. 43–60). La créativité est au coeur du processus de maturation. Elle est d’abord un mode d’être et d’exister, sans talent spécial car “on peut regarder créativement un arbre”, mode d’exister qui donne le sentiment que la vie vaut la peine d’être vécue. “La créativité est alors un faire qui est issu d’un être”, et pourra ou non devenir la production d’un produit fini objectivé dans une oeuvre. La créativité, assimilée à la vie, est l’indicateur de la bonne santé mentale: mais “nous sommes vraiment pauvres si nous ne sommes que sain”. Jan Abram, la grande exégète de son oeuvre, suggère que la création pour Winnicott peut être assimilée à la pulsion de vie freudienne (Abram, 1996). Le créativité est la version adulte du jeu. “Jouer, affirme l’auteur, constitue la fondation de l’expérience culturelle” (Winnicott, 1971q, pp. 145–152). Si un thérapeute ne sait pas jouer, cela signifie qu’il n’est pas fait pour ce travail (Winnicott, 1971n, pp. 75–90). Dans la cure, l’analyste doit savoir s’abandonner à un état où la forme et le temps n’existent pas, et se laisser aller à l’incertitude, pour pouvoir accueillir l’incohérence, le chaos et l’absurde du patient. Vouloir mettre de l’ordre dans le chaos et trouver un sens à l’absurde en croyant être un analyste intelligent, c’est abandonner l’attitude professionnelle (Winnicott, 1971n, p. 76).

2.5. Le Squiggle game

Dans la consultation avec un enfant, Winnicott commence par tracer spontanément un griffonnage et demande à l’enfant d’en faire quelque chose; et chacun à son tour ajoute quelque chose au dessin de l’autre pour le transformer. Ce qui peut être considéré comme une technique projective, est d’abord un moyen simple d’entrer en contact avec l’enfant, d’instaurer un être–avec, une intimité, un espace commun de jeu et de liberté où l’enfant est actif. “C’est pourquoi, écrit Winnicott, la relation des paroles prononcées par l’enfant et le thérapeute a tendance à sonner juste. .... C’est à peine si l’on peut parler de technique” (1971n, p. 6). Le squiggle est un espace transitionnel entre l’enfant et le thérapeute: un événement a lieu, du fait de sa reconnaissance par l’autre. Il vise à faire émerger une forme de l’informe, que la traduction française de “gribouillis’’ rend mal, et la possibilité qu’advienne un sens. C’est un jeu sans règle (un play et non un game, en dépit de sa dénomination de squiggle game) où il s’agit de se laisser surprendre par ce qui surgit dans les traces de la présence de l’autre. L’impulsivité du geste se fige dans le tracé et un autre mouvement prend la relève pour conduire à une idée. Le jeu est orienté par son mouvement propre vers quelque chose qui se découvre en se dissimulant. Dans les cas cliniques, on peut voir comment le jeu évolue vers un détail significatif, l’écriture du désir, le point de détresse ou de conflit qui est le noeud du développement où l’enfant reste bloqué, et parfois le point de surgissement des rêves et des cauchemars, à partir desquels peuvent s’amorcer dialogue et interprétation. Le squiggle peut parfois devenir angoissant. Il ne fonctionne qu’à la condition que l’enfant ait confiance dans la relation professionnelle que lui propose le thérapeute. A titre d’exemple, j’évoquerai ici, pour sa simplicité, la vignette clinique de Iiro (1971n, 1970, p. 266), un petit suédois de 9 ans avec qui Winnicott communique avec l’aide d’un interprète.

L’enfant est constamment hospitalisé et opéré pour une syndactylie, c’est–àdire les doigts des mains et des pieds collés. Sa mère a en partie la même difformité et insiste beaucoup pour qu’on opère son fils. Du premier squiggle, l’enfant fait la patte palmée d’un canard et parle de son amour pour des canards; puis vient sous son crayon une anguille, animal primaire sans bras, ni jambes, ni doigts. Ce qui peut être dit alors, c’est qu’au delà de la culpabilité maternelle et de son désir de réparation du corps de son enfant, Iiro a besoin d’être sûr d’être aimé tel qu’il est.

2.6. Le Self

Le Self est un concept embarrassant car Winnicott lui–même en fait un usage fluctuant: il est synonyme parfois de psyché, parfois du moi. Il ne coïncide avec aucune des topiques freudiennes. Il n’est pas le Soi de la psychanalyse américaine et de Kohut. Il n’est pas non plus le décalage du Jede l’énoncé et du Je de l’énonciation chez Lacan. A travers l’étude de ses différents usages dans la langue anglaise, Pontalis (1977b, pp. 1176–1177) montre que le terme même de Self est inexportable et surtout pas traduisible comme Soi. Le terme latin d’ispéité lui parait la seule traduction convenable; d’où, dit–il, l’embarras de la psychanalyse française devant ce concept “pré–analytique’’ . Il y a un Faux Self et un Vrai Self, qui ne désignent pas deux types de personnalité, mais un couple, une bipolarité au sein d’un même individu. Le Faux Self dissimule le vrai pour le protéger. Le Vrai Self résulte du processus d’intégration, qui unifie les expériences multiples et fragmentées, et de l’association psychosomatique3, la capacité d’habiter son corps. Selon B. Dessain, le Self répond à l’aphorisme selon lequel il est de notre nature d’être culturel (Dessain, 2007, p. 88). Car il est la relation entre l’organisme et l’environnement, et n’advient que par l’autre. Il est l’avènement de la conscience de soi sur le fond de la continuité d’être. Le Vrai Self est l’auteur du geste spontané et de la pensée personnelle. Pour le définir, Winnicott en appelle à Polonius, personnage d’Amlet Shakespeare: “Avant tout: sois véridique avec toimême, d’où découlera comme du jour la nuit, que tu ne seras faux pour personne” (1986e, p. 94).

Il y a un Self secret, ou plus exactement un noyau secret du Self qui est là au début de la vie, mais n’existe que s’il est protégé et isolé. Il est “inaccessible au principe de réalité et pour toujours silencieux”. “car les relations et communications ayant une signification sont silencieuse” (1965j, pp. 151–168). C’est du noyau secret du Self qu’émane le sentiment de se sentir réel et “un besoin de ne pas être trouvé” que l’analyste doit respecter. “Au coeur de chaque personne se trouve un élément de non–communication qui est sacré et dont la sauvegarde est très précieuse” (1965j, p. 161). Si le Self est, pour reprendre l’expression de B. Dessain, l’avoir–lieu de l’être, le noyau secret du Self serait alors une sorte tabernacle de l’être: “là, la quiétude est liée au silence” (1965j, p. 161), écrit l’auteur. A cet égard, Winnicott reconnaît au patient le droit au silence, qui ne doit pas être interprété comme une résistance, et “le droit de ne pas être découvert”. L’idée est provocante pour le thérapeute qui verrait dans l’aveu du patient l’instrument de son pouvoir.

Il faut imaginer le Faux Self comme une sorte d’éventail qui, d’un côté est le Faux Self normal, et de l’autre le Faux Self pathologique. Le Faux Self normal, comme la persona jungienne, est notre être social policé et adapté, qui sait faire des compromis, derrière lequel se protège le Vrai Self. Le Faux Self dont il sera maintenant question est le Faux Self pathologique, qui a donné dans la nosographie psychiatrique anglaise les personnalités As if, littéralement omme si, les pathologies apparemment normales. Le Faux Self émane d’une soumission passive à l’environnement qui porte atteinte à l’intégrité de l’être. Il est une forme d’auto–protection et se forge une écorce qui l’isole et protège son noyau authentique pour en assurer la survie. Le développement du Faux Self est l’une des organisations défensives les plus réussies. Le sujet pourra être parfaitement adapté à la société environnante, sous l’aspect de l’intellectuel brillant, de artiste reconnu, du mondain recherché ou du travailleur rentable. Mais il doit composer avec ses vécus d’irréalité, de nullité, ses sentiments de futilité et du non–sens de sa vie. Si le Self secret doit rester inconnaissable, le but de la cure est de découvrir le Faux Self, plus ou moins caché sous son apparente normalité; mais il peut collaborer très bien et très longtemps avec l’analyste, sans se laisser entamer. La patient perd alors la chance de trouver son Vrai Self. Winnicott cite à plusieurs reprises les propos d’une analysante: “Se cacher est un plaisir, mais ne pas être trouvé est un désastre”.

2.7. La psychose selon Winnicott

On risque d’être désorienté par la nosographie de Winnicott: d’abord parce qu’il s’agit de la nosographie anglaise des années 50 et 60; ensuite parce qu’il n’use pas toujours d’une classification rigoureuse, qu’il trouve superficielle et inadaptée à l’infinie variété de la pathologie humaine. A ma connaissance, on ne trouve pas dans ses articles de réflexion sur la psychose maniaco–dépressive. Fidèle ici aux kleiniens, il utile la notion de défense maniaque contre la dépression et la position dépressive conçue comme moment structural du développement de l’enfant. La dépression est intégrée à la peur de l’effondrement. Mais il délaisse la position schizo–paranoïde infantile de M. Klein au profit des éléments paranoïdes persécutoires chez les adultes et les enfants. La psychose pour lui, c’est la schizophrénie et la très grande variété des états schizoïdes et des Faux Self pathologiques. Signalons enfin, mais je n’en parlerai pas ici, son important travail sur la délinquance juvénile comme “signe d’espoir’’ et les tendances anti–sociales (1968e, pp. 130–144).

On l’aura compris, l’adaptation inconstante aux besoins de l’enfant esttraumatique au stade de la dépendance absolue. L’empiètement et la privation, traduite parfois comme déprivation, autrement dit le trop ou le manque, sont les deux figures du traumatisme. L’empiètement est un envahissement non élaborable qui induit l’isolement du Self; la privation provoque une distorsion psychotique de la structure enfant/environnement. En lieu et place de quelque chose qui aurait pu être, rien ne s’est produit: s’en suivent un effondrement dans l’aire de la confiance et la perte d’espoirdans le devenir. Dans un très court article qui a pour titre “Rien au centre”, il dit comment une patiente se tient “dans un centre vide, un trou, un néant, une faim de tout propre à l’ensemble de sa vie (Winnicott, 1959, p. 57)”.

L’angoisse la plus primitive est celle d’avoir été porté de façon non sécurisante. Les ruptures de continuité provoquent chez le bébé des angoisses d’annihilation que Winnicott décrit ainsi: “faire une chute sans fin, s’en aller en morceaux, mourir, mourir, mourir (sic), perdre tout espoir de voir le contact se rétablir” (Winnicott, p. 121) 50. La psychanalyse des psychoses est conçue comme un véritable Holding thérapeute/patient, que l’on peut rapprocher du Tragung, du “portage” dont parle Binswanger. Le cadre fiable de la cure favorise la régression à la dépendance et l’émergence des vécus archaïques non verbaux qu’il faut accompagner sans les interpréter. Au début des années 50, Winnicott théorise la notion de régression, définie simplement comme inversion du progrès dans le mouvement naturel de maturation. Il croit à la possibilité de corriger la défaillance primaire, si le patient possède une capacité latente à régresser. Alors que la communauté psychanalytique considère les troubles psychotiques comme inanalysables, il doit se défendre contre les critiques: il écrit qu’il n’induit pas la régression mais l’accueille quand elle arrive, alors que d’autres l’empêchent. Si la régression est dangereuse, c’est en raison de l’incapacité de l’analyste à l’assumer (Winnicott, 1954, pp. 223–230) 51, conclut–il. Rappelons qu’une décennie plus tard, les anti–psychiatres anglais, R. Laing, D. Cooper, A. Esterson, etc., à partir d’une théorisation différente, reprendront la régression comme thérapie des schizophrènes au célèbre hôpital de Kingsley Hall, ce dont témoigne le livre saisissant de M. Barnes, Voyage à travers la folie (1976).

La régression à la dépendance engage le thérapeute à des aménagements bien loin de la seule neutralité bienveillante. Le Holding, mais jusqu’où? On possède le témoignage d’une de ses patientes, Margareth Little, Borderline ou psychotique, qui devint plus tard analyste. Dans ses moments de grande régression, Winnicott doublait régulièrement la durée des séances (on parle parfois de séances de trois heures ! ), lui tenait les mains et la tête, lui donnait du café et des biscuits à la fin de chaque séance. Elle dit aussi, sans plus de précisions, qu’il pratiquait un Holding métaphorique avec les patients névrotiques et un Holding latéral avec les autres (Quinodoz, pp. 204–208). Notons en passant que, comme Lacan, Winnicott est tancé par les instances psychanalytiques officielles de son pays sur la durée des séances, trop courtes pour Lacan, trop longues pour Winnicott.

Ecrit en 1963, l’article Fear of breakdown, en français La crainte de l’effondrement, a un immense retentissement dans la communauté psychanalytique. Précisons que le terme Breakdown en anglais signifie à la fois la cassure, la chute, la panne, la dépression, etc. et Winnicott en revendique la polysémie. Dans le cadre sécurisant de la cure, certains patients expriment une crainte de s’effondrer. Ce peut être la crainte d’une chute sans fin4, la peur de se morceler, de se dissocier de son corps, d’être désorienté et isolé, de plus avoir de relations objectales. Cette crainte traduit la peur que s’effondre l’organisation défensive du sujet. Une organisation défensive contre quoi? Contre une primitive agony, à savoir une expérience de détresse extrême, une angoisse d’annihilation impensable, aux limites de ce qu’un être humain est capable d’éprouver, et pour laquelle le mot angoisse n’est ici pas assez fort5. Winnicott considère la psychose et les états Borderline comme une défense contre cette agonie primitive. L’effondrement redouté est celui du Self unitaire. Ces agonies primitives, suggère l’auteur, pourraient être, à des degrés d’intensité divers, un phénomène universel de la prime enfance, que peu ou proue nous aurions tous traversés. Mais surtout, nouveau paradoxe, la crainte de l’effondrement, exprimée comme une possibilité à venir, a déjà eu lieu dans le passé et le patient ne le sait pas. Il y a comme un ressac massif de la temporalité, qui rabat l’avenir sur le passé archaïque. Le Breakdown s’est produit sans trouver un lieu psychique pour se déposer, car le moi était trop immature pour rassembler le choc en expérience. Il y a un trou, un vide d’expérience, un non–éprouvé, la trace lacunaire d’une mémoire amnésique. Quelque chose a eu lieu qui n’a pas eu lieu. Quelque chose a lieu sans lieu. Il ne s’agit pas d’un traumatisme enfoui dans la mémoire et refoulé comme pour l’hystérique ou d’un clivage du moi: “Ce qui échappe à toute possibilité de mémorisation est au creux de l’être’’, commente Pontalis dans sa célèbre préface à Jeu et réalité, décrivant le paradoxe de cette agonie primitive qui n’a pu s’inscrire qu’en négatif, faute d’un lieu psychique où se déposer. “Rien ne s’est passé quand cela aurait pu se passer”, dit Winnicott. Ce rien est pourtant l’origine de cette construction défensive qu’est la psychose. On est ici aux limites de l’analysable, et ce qui détermine le psychotique lui échappe. L’intervention du thérapeute vise à rétablir la temporalité de l’effondrement: il doit verbaliser au patient que la crainte de s’effondrer qui mine sa vie n’est plus à redouter dans l’avenir car elle a déjà eu lieu dans le passé. L’expérience originelle d’agonie primitive ne peut être mise au passé que si le moi peut d’abord la faire entrer dans sa propre expérience du temps présent, note Winnicott. La réactualisation de l’agonie primitive dans la cure, avec le soutien actif de l’analyste, permet une nouvelle issue. On mesure la portée épistémologique d’une telle réflexion. Winnicott la prolonge par la crainte de la folie et la crainte de la mort, comprises là encore comme trace d’une agonie archaïque. La crainte de la folie (Winnicott, 1965, pp. 217–230) traduit un besoin temporaire d’être fou dans le cadre thérapeutique. L’analyste devra alors affronter un transfert délirant qui le met en position de persécuteur. L’auteur précise à nouveau l’inutilité d’analyser les défenses contre l’angoisse, et la nécessité d’atteindre le noyau même de cette angoisse pour espérer la dépasser. L’effondrement concerne aussi la crainte de mourir “car il n’est pas besoin de beaucoup modifier la thèse de la crainte de l’effondrement pour la transférer à la crainte de la mort”. Chez certains patients, la quête compulsive de la mort répond au besoin de revenir à la cassure de leur sentiment de continuité d’exister pour l’éprouver enfin, pour tenter de récupérer par le suicide la maîtrise d’une annihilation révolue. Mettre en acte ce qui n’a pu être mis en scène, en quelque sorte. “Nombreux sont les hommes ou les femmes qui passent leur vie à se demander si la solution est le suicide, c’est–à–dire à envoyer leur corps à la mort qui s’est déjà produite pour la psyché” remarque Winnicott. Il ajoute: “Je comprends maintenant pour la première fois ce que voulait dire ma malade schizophrène (qui s’est tuée) lorsqu’elle disait: “Tout ce que je vous demande de faire est de m’aider pour que je me suicide pour la vraie raison et non pour la fausse’’. Je n’y ai pas réussi et elle s’est tuée en désespoir de cause. Son but, tel que je le vois maintenant, était de parvenir à ce que je lui dise qu’elle était morte dans sa petite enfance. Sur cette base, je pense qu’elle et moi aurions pu la mettre en mesure de retarder sa mort jusqu’à ce que la vieillesse réclame ses droits nouvelle (Winnicott, 1963)”

 

3. Vignette Clinique

Il s’agit de Philippe, âgé de 20 ans, hospitalisé en hôpital psychiatrique depuis l’âge de 15 ans et diagnostiqué comme schizophrène paranoïde. Un jour, sans qu’on ai pu en comprendre la raison, il entre dans un moment “d’enfoncement psychotique’’ où le délire fait place à une angoisse massive vécue au ras du corps, qui s’exprime par la crainte d’étouffer. Précisons qu’il fait froid et que le patient n’est pas asthmatique. Son souffle est court et haletant, son visage est rouge et il sue littéralement d’angoisse; il ouvre la fenêtre pour chercher un filet d’air, il n’arrive quasiment plus à parler. Il nous dit seulement d’une voix étranglée qu’il étouffe, et nous supplie de lui donner un masque à gaz pour le sauver. Nous avons l’impression qu’il est en train de se noyer dans son angoisse et qu’il va mourir. Avec deux infirmiers, nous décidons de rester avec lui, pour respirer avec lui, à côté de lui, autour de lui.... Dans l’urgence, obéissant à la nécessité première, nous inventons de façon totalement empirique ce que j’appellerai aujourd’hui un Holding respiratoire, visant à soutenir sa respiration haletante en la synchronisant à la nôtre. Et de fait, au bout de quelques heures, Philippe s’apaise. A la fin de la journée, il respire normalement, il est plus calme et ne sue plus. Il est à nouveau capable de parler et ne parle plus de son angoisse d’étouffer. Epuisé, il s’endort. Les jours suivants, il va retrouver peu à peu son habituel registre de fonctionnement paranoïde, son vécu de persécution sur un mode modéré. Il va le moins mal possible. Et cet épisode ne se reproduira plus. Au soir de cette rude journée, je relie son dossier médical et je retrouve une note qui m’avait échappée: quelques années auparavant, sa mère avait confié à un interne que Philippe avait eu une asphyxie à la naissance, qu’il avait failli mourir, et qu’on l’avait réanimé avec un appareil à oxygène. Il ne semble pas en avoir gardé de séquelles dans son développement neurovégétatif. Mais de fait, cette angoisse d’étouffement, il l’avait déjà vécue au moment de naître. Ce “masque à gaz’’ qu’il nous suppliait de lui donner, il l’avait déjà eu en venant au monde, et il lui avait sauvé la vie.

Certes, le contexte n’est pas celui du Breakdown décrit par Winnicott. L’angoisse d’étouffement de Philippe surgit dans le présent absolu de l’urgence, dans un moment d’effondrement où, vraisemblablement, les mécanismes de projection n’opèrent plus. L’angoisse est vécue hors mentalisation, dans le corps, et son intensité met à mal le réflexe fondamental de la respiration, avec ce vécu de mort imminente. C’est la première fois que je suis confrontée à une semblable angoisse et d’un tel paroxysme. Je la comprends comme le retour possible de l’asphyxie de la naissance, comme trace de cette agonie primitive. Disons pour finir que j’ai retrouvé récemment à plusieurs reprises dans les textes de Winnicott la notion de Holding respiratoire: la respiration du thérapeute contient le patient en assurant la continuité de vie.

Pour conclure provisoirement, on peut peut–être rappeler que les psychanalystes croient que l’on ne peut comprendre, soigner, penser la folie qu’à partir d’un manque personnel, d’un défaut fondamental, d’une faille intime ou d’une douleur secrète où s’origineraient nos pulsions épistémologiques et réparatrices. Aussi, certains d’entre eux se demandent pourquoi Winnicott le premier a su percevoir de tels abîmes dans l’être humain, qu’il n’a pu que leur donner ce nom terrible d’agonie primitive. Mais pourquoi est la question des psychanalystes, et comment la question des phénoménologues. Ce comment nous renvoie à tout les créateurs qui ont tenté de dire la défaillance originelle du monde et l’impensable douleur: à lire Blanchot, c’est d’un point d’absence et d’inanité que se déploient les oeuvres d’Hölderlin, de Mallarmé, d’Artaud et de tant d’autres qui ont tenté leur écriture du désastre. Ici, on peut citer une dernière fois Winnicott: “Si ce que je dis à quelque vérité, les poètes en auront sûrement parlé’’.

 

Referências

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Endereço para correspondência
E–mail: jeanine.chamond@u–paris10.fr

Enviado em: 26/1/2009
Aprovado em: 13/3/2009

 

** Psychologue clinicienne, psychothérapeute de formation analytique, Maître de conférences à l’université de Paris X – Nanterre, secrétaire de l’Ecole Française de Daseinsanalyse.
1On peut considérer cependant à partir de quelques indices dans ses textes, qu’avant sa théorisation explicite dans les travaux de 1955, lê père est pensé de façon implicite comme assurant le Holding de la mère.
2 L’auteur développe la thèse que la mère de Winnicott souffrit de dépression.
3 Appelée aussi “personnalisation” en référence à la dépersonnalisation psychotique.
4 On peut penser aux rêves de chute étudiés par L. Binswanger (1971), chute dont il fait, avec l’ascension, une direction de sens. (Chamond, 2004).
5 Pour l’un de ses traducteurs, M. Gribinski, le terme français d’agonie est un faux ami et il lui préfère le terme “d’angoisse disséquante”. Mais la traduction littérale semble avoir été définitivement adoptée. Cf. Gribinski (Winnicott, 1989), (Cyssau, 2006).