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Psicologia da Educação

versão impressa ISSN 1414-6975versão On-line ISSN 2175-3520

Psicol. educ.  n.19 São Paulo dez. 2004

 

ARTIGOS

 

Apprentissage et développement dans l’analyse du travail enseignant

 

Aprendizagem e desenvolvimento na análise do trabalho do professor

 

Learning and development via teacher’s profession analysis

 

Aprendizaje y desarrollo en el análisis del trabajo del profesor

 

 

Frédéric Yvon; Yves ClotI, *

I Conservatoire National des Arts et Métiers - Paris

Endereço para correspondência

 

 


RESUMO

O objetivo do artigo é demonstrar como a relação entre aprendizagem e desenvolvimento pode ser articulada no conceito de atividade, notadamente na do professor, especificando: a) a definição de atividade adotada; b) a metodologia empregada para abordar a atividade do ponto de vista da relação entre desenvolvimento e aprendizagem; e, c) as relações entre aprendizagem, desenvolvimento e atividade. Partindo das idéias de Vygotski e de Baktine, os autores distinguem, inicialmente os conceitos de tarefa e de atividade, mostrando, em seguida, como a análise do trabalho – dirigida, inicialmente, aos objetos a serem conhecidos (a atividade) – pode fornecer aos trabalhadores dela beneficiários, uma ocasião para aprenderem (apropriando-se de um gênero de atividade, ou seja, de um processo formativo de interação) e se desenvolverem, enriquecendo sua experiência de forma durável. O artigo termina com um exemplo de como utilizar a metodologia sugerida para analisar o ofício do professor, apontando, ainda, como os achados obtidos vinculam-se aos conceitos vygotskianos acerca da relação desenvolvimento e aprendizagem.

Palavras-chave: Desenvolvimento e aprendizagem, Atividade, Atividade docente.


ABSTRACT

The aim of the article is to demonstrate how the relation between learning and development can be articulated in the concept of activity, especially in that of the educator. For such, it discusses: a) the definition of activity employed; b) the methodology followed to deal with the notion of activity from the point of view of the relationship between learning and development; c) the relation among learning, development and activity. Based on the ideas of Vygotski and Baktine, the authors make a distinction between role and activity, to show, next, how the analysis of work, which initially focus the objects to be known (the activity) can furnish to the workers who shall benefit from it, an occasion to learn (or to appropriate of a gender of activity or, better saying, of a process of formative interaction) and to develop, enriching their experience in an even basis. The article ends providing an example of how to employ the suggested methodology for analysing teachers’ work, indicating how the results can be linked to Vygotski ideas about the relationship between learning and development.

Keywords: Learning and development, Activity, Teacher's activity.


RESUMEN

El objetivo del artículo es demonstrar cómo la relación entre aprendizaje y desarrollo puede ser articulada en el concepto de actividad, especialmente en la actividad del profesor, especificando: a) la definición de actividad adoptada; b) la metodología empleada para abordar la actividad del punto de vista de la relación entre desarrollo y aprendizaje; y c) las relaciones entre aprendizaje, desarrollo y actividad. A partir de las ideas de Vygotski y de Baktin, los autores distinguen, inicialmente, los conceptos de tarea y de actividad, mostrando, en seguida, cómo el análisis del trabajo, dirigido inicialmente, al objeto de estudio (la actividad) puede ofrecer a los trabajadores beneficiarios de este estudio, una ocasión para aprender (apropriándose de un género de actividad, o sea, de un proceso formativo de interación) y se desarrollar, enriqueciendo su experiencia de forma permanente. El artículo termina com un ejemplo de cómo utilizar la metodología sugerida para analizar el trabajo de profesor, señalado, aún, cómo los resultados obtenidos están vinculados a los conceptos de Vygotski respecto a la relación desarrollo y aprendizaje.

Palabras clave: Desarrollo y aprendizaje, Actividad, Actividad de profesor.


 

 

Position du problème

Parmi l’héritage que nous a légué l’œuvre de Vygotski apparaît de premier plan les questions d’apprentissage et de développement. Nous tenterons dans cette contribution de revisiter ces questions du point de vue de leur rapport. Pour ce faire, il nous repartir de là où émerge le problème, autrement dit des textes de Vygotski eux-mêmes. La thèse se distingue de trois autres positions que Vygotski recense (Vygotski, 1933/1985; Vygotski 1934/1997; Rivière, 1990).

La première conception rapportée est attribuée à Piaget. Elle décrit l’apprentissage et le développement comme deux processus indépendants. Le premier s’insère dans le second sans en déterminer la forme ni la direction. L’apprentissage apporte un contenu à une forme qui lui préexiste et qui s’engendre selon une dynamique qui ne dépend pas de lui. En ce sens Le développement est antérieur à l’apprentissage.

Selon la seconde conception , apprentissage et développement se confondent. Il s’agit du même processus. Tout apprentissage se traduit en terme de développement et tout développement est lui-même un apprentissage. Cette position est attribuée à James et au paradigme réflexologique.

La troisième position est mentionnée par Vygotski comme la tentative de synthèse des deux précédentes. Kofka est présenté pour celle-ci comme le représentant de ce courant. Cette position pose la distinction des deux processus (conformément à la première position) et leur influence réciproque (conformément à la deuxième).

Vygotski tire de la troisième conception l’idée importante que l’apprentissage détermine le développement. Les deux processus ne sont bien sûr pas séparés, mais l’apprentissage fait subir une réorganisation aux fonctions psychiques supérieures qui peuvent subir une révolution et se développer dans une autre direction. Cette thèse s’oppose par conséquent en premier plan aux thèses de Piaget et de la psychologie génétique. Au delà, la différence d’appréciation des rapports entre développement et apprentissage chez l’enfant, c’est avant tout une conception différente du développement qui les sépare. On pourrait caractériser le concept de développement chez Piaget comme un déploiement génétique sur un mode évolutionniste ou biologique de la germination. Le développement, dans cette acception, est conçu comme allant de l’interne vers l’externe (Schneuwly, 2002; Sève, 2002).

A l’inverse, pour Vygotski, le développement du psychisme n’a pas sa source à l’intérieur de la pensée comme libre déploiement de soi-même à la rencontre du monde au contact duquel il se transforme en s’adaptant (suivant les trois moments d’accommodation, d’assimilation et d’équilibration). Les fonctions psychiques supérieures ont leur origine dans le rapport de l’enfant à autrui et aux objets culturels (signes, symboles, instruments techniques). C’est la médiation qui est l’élément fondateur du psychisme. Elle relie, comme l’a bien vu Léontiev, deux moments corrélatifs déterminant les particularités de la vie psychologique humaine, “la structure instrumentale de l’activité de l’homme et son insertion dans le système des rapports avec les autres hommes” (1984, p. 106). Cette conception du développement amène par conséquent Vygotski à postuler l’antériorité de l’apprentissage sur le développement. “L’apprentissage ne coïncide pas avec le développement, mais active le développement mental de l’enfant, en réveillant les processus évolutifs qui ne pourraient être actualisées sans lui.” (Vygotski,1933/1985, p. 112). Pour le dire dans un autre vocabulaire, l’intériorisation, défini comme appropriation et transformation réciproque (Vygotski, 1978; Léontiev, 1976; Wertsch & Addison Stone, 1985; Clot, 2002; Yvon, 2001) précède le développement. Elle est le point de départ d’une réorganisation des fonctions psychiques et de la pensée consciente (Bronckart, 2002).

C’est dans ce cadre que vient s’insérer le concept de zone de proche développement d’abord définie comme l’espace de développement actualisable àl’aide d’autrui dans un rapport d’imitation. Plus poussée, l’analyse de 1934 déplace la notion pour désigner le développement potentiel consécutif à l’apprentissage, autrement dit la réorganisation interne du psychisme dans la confrontation des concepts quotidiens et des concepts scientifiques (Brossard, 2002).

On pourrait déduire de ce qui précède un primat unilatéral de l’apprentissage sur le développement, autrement dit de l’externe sur l’interne. Soucieux de préserver une dialectique entre ces deux termes, nous avançons ici l’hypothèse que le rapport entre apprentissage et développement s’articule autour d’un troisième terme: l’activité. Cette hypothèse ouvre sur une série de trois questions que nous allons tour à tour aborder:

– Quelle définition retenir de l’activitépour procéder à son analyse?
– Quelle méthodologie mettre en place pour aborder l’activité du point de vue du rapport entre apprentissage et développement?
Quels sont enfin les rapports entre apprentissage, développement et activité?

Ce qui suit mobilise la tradition d’analyse du travail. Compte tenu du thème de ce numéro et malgré notre plus grande familiarité avec les milieux professionnels de l’industrie ou des services (Clot, 1999b; Yvon & Fernandez, 2002) nous avons choisi de rendre compte d’une analyse du travail en milieu éducatif. Il s’agit du métier de professeur. Il a fait l’objet de peu d’analyses et de trop peu d’élaboration méthodologiques pour ces analyses (Amigues, Faïta & Saujat, 2002; Durand, 2000; Goigoux, 2002; Saujat, 2002; Roger, Roger & Yvon, 2001) Mais on nous permettra d’abord un repérage du problème dans le champ disciplinaire qui est le nôtre.

 

L’analyse du travail en question

On distinguera comme point de départ l’analyse du travail et l’analyse psychologique du travail ou analyse de l’activité, suivant en cela les analyses de Jacques Leplat (1992, 2000a, 2002). Il faut selon lui remonter aux travaux de Lahy pour trouver un intérêt pour les observations concrètes de l’activité en situation de travail (Leplat, 2000b). Cette démarche s’inscrit dans une tentative de renouvellement de la psychologie générale en alternative à la psychologie de laboratoire (Lahy, 1932). Néanmoins, il faut bien souligner que cette portée épistémologique de l’analyse du travail s’est perdue dans la psychotechnique transformée en psychométrie (Leplat, 1993; Clot, 1996).

Il faut attendre l’ouvrage de Ombredane & Faverge (1955) sur l’analyse du travail pour assister à une première systématisation de l’analyse du travail à laquelle se voit attribuer, outre la sélection et de l’orientation professionnelle, trois autres finalités: la formation professionnelle, la qualification du travail et l’aménagement du travail. Son domaine devient alors co-extensif à la psychologie industrielle (Lévy-Leboyer, 1987). Ces distinctions du champ de la pratique trouve son fondement dans une distinction introductive entre le “Quoi” et le “Comment” du travail. Elle participe à la naissance de l’ergonomie de langue française que l’œuvre de Alain Wisner caractérise si bien (Wisner, 1995).

Cette distinction apparaît de nos jours développée et reformulée par Leplat & Hoc (1983) sous la forme tâche et activité. L’analyse du travail en psychologie ergonomique, en ce sens peut avoir pour objet l’analyse de la tâche, de l’activité ou des deux. Si une partie de la tradition s’est orientée vers la connaissance et le modélisation de la tâche effective (Amalberti & Hoc, 1998), nous avons essayé de défendre ailleurs (Clot, 1999b; Yvon, 2001) en utilisant les travaux de Vygotski (1978), l’idée que l’activité était moins un couplage qu’un dialogue dynamique entre sujet et tâche. La tâche n’explique pas le sujet mais il s’explique avec elle, à tous les sens du terme. Plus qu’une interaction entre ces deux pôles, l’activité s’inscrit dans l’histoire du sujet, du collectif et du métier et puise ses ressources – ou trouve ses obstacles – dans chacun des trois en assumant les conflits inhérents à leurs rapports. L’issue peut alors être double: soit la résolution toujours provisoire de ces conflits échoue et l’activité épuise le sujet jusqu’à l’apparition de troubles psychopathologiques (Clot, 2001b; Yvon & Fernandez, 2002), soit elle alimente le développement du sujet, tant du côté du sens que de l’efficience de son action (Clot, 1999b).

Dans ce qui suit on parlera d’activité entendue comme appropriation de la tâche par le sujet. Il reste à savoir comment procéder à son analyse et avec quelle(s) finalité(s).

Les méthodologies concernées par le champ de la psychologie ergonomique se servent traditionnellement de l’analyse de l’activité comme instrument de connaissance des situations de travail (de Keyser, 1988; Theureau, 1992). Leplat (2000a) reprenant une définition classique de l’analyse du travail comme instrument de production de connaissances souligne que: “L’analyse de l’activité cherche à identifier les conditions de celles-ci et les mécanismes qui la règlent” (p. 5). Cette définition a une visée pratique. Il s’agit pour reprendre une formule familière de “comprendre pour transformer” (Guérin, Laville, Daniellou, Duraffourg & Kerguelen, 1991). La connaissance précède ici l’action et l’analyse du travail en est l’instrument méthodologique chargé de recueillir les données empiriques à partir des quelles va s’orienter l’activité d’expertise et de préconisation et la guider:” Le but de l’analyse du travail est pratique: il s’agit de comprendre ce que font les opérateurs en situation de travail afin de répondre le plus efficacement et le plus complètement possible aux questions de la conception” (Pinski, 1991, p. 119 ).

Néanmoins, si la vocation première de l’analyse du travail est de fournir des connaissances sur le travail réel et l’activité des opérateurs, de Terssac (1990) n’a pas manquéde souligner que ces informations sur les processus réels de travail avaient, par effet indirect, des impacts importants sur les relations sociales au travail. “L’analyse du travail est avant tout une remise en cause des relations de travail dès lors qu’elle s’intéresse à toutes les réactions de contestations des règles officielles qui témoignent de l’autonomie des exécutants” (p. 31) qui par conséquent ne sont plus des simples exécutants, mais aussi des re-concepteurs de leur tâche. En ouvrant la boîte noire du travail, force est de constater que les opérateurs, non seulement ne suivent pas à la lettre les procédures prescrites, mais aussi qu’ils réinventent le prescrit face au réel (tâche redéfinie) et sont amenés à affronter des difficultés que l’encadrement ne soupçonnait pas ou ne voulait pas voir. Ainsi, l’analyse du travail permet de produire lors de négociations sur l’aménagement des conditions de travail, des éléments propres à faire varier les positions respectives et à engager éventuellement le dialogue (de Terssac, 1991).

Il ne s’agit plus simplement de s’informer des situations réelles afin d’alimenter une expertise, mais de documenter un certain point de vue pour modifier les représentations sur le travail, tant du côté de l’opérateur que de la direction. L’impact de ces connaissances nourrit les représentations des acteurs et permet d’alimenter les négociations. Nous interprétons cet enrichissement des effets de l’analyse du travail interprété comme instrument. Instrument de connaissance, il est à la fois instrument social pris dans l’histoire des rapports de pouvoir au sein du milieu de travail. L’adresse de l’instrument s’enrichit du même coup: dirigé dans un premier temps sur les objets à connaître (l’activité), il peut trouver dans l’adresse à autrui (les bénéficiaires de l’intervention) un occasion de se développer. C’est ce développement-là que nous cherchons à poursuivre en mobilisant les contributions qui ont alimenté cette réflexion.

Parmi elles, il faut mentionner les travaux de Daniellou (1992, 1996). Ce dernier complète cette lecture sociologique de l’analyse du travail par un point de vue épistémologique en posant deux principes: l’analyse du travail fournit un point de vue particulier sur la situationde travail; il n’y a pas de rapport immédiat entre la connaissance, le diagnostic et l’action, le pronostic. Tout au plus peut-elle alimenter et transformer les représentations des acteurs pour leur permettre de transformer la situation. “C’est la mise en discussion, auprès des acteurs sociaux pertinents, des résultats de l’analyse du travail qui enclenche le processus de transformation des représentations, qui peut déboucher sur des interactions conduisant à une transformation de la situation de travail.” (1996, p.187). L’évaluation d’une intervention peut ainsi moins porter sur les modifications effectives de la situation que sur les changements de représentations sur le travail, c’est-à-dire changer le rapport et la manière de dire le travail. La linguistique (Faïta, 1989; Boutet, 1993) et la psychodynamique du travail (Dejours, 1993) ont apporté une contribution majeure dans ce sens.

Il faudrait ajouter pour être complet une dernière contribution importante au développement de l’analyse de l’activité appliquée au domaine de la formation (Rabardel & Six, 1995; Leplat, 2002). Teiger (1987, 1993) a proposé une utilisation de l’analyse de l’activité dans le cadre de formation de délégués de CHSCT. La démarche n’est plus directement tournée vers la situation de travail mais vers les sujets qui sont invités à expérimenter sur eux-mêmes l’apport d’une démarche d’analyse du travail réel. Faute de pouvoir se réaliser sur le terrain, l’analyse passe par des récits d’explicitation. La méthode s’apparente dans ce cadre à une maïeutique exercée sur les savoir-faire et ce que nous pourrions nommer avec Leplat les compétences incorporées (1997). Ce dispositif vise à modifier le regard des délégués sur le travail, donc au premier plan à modifier leurs représentations ouvrant sur “une action de changement de la situation” (Teiger, 1993, p. 314).

Néanmoins Teiger & Laville (1991) insistent sur le fait qu’il n’y a pas automaticité entre changement de représentation et transformation de la situation. Entre les deux, les possibilités d’action concrètes peuvent manquer. Autrement dit, entre le développement potentiel de la situation de travail et le développement réel s’intercalent les variables de l’organisation du travail.

On notera la proximité de cette utilisation de l’analyse du travail tournée cette fois au premier plan vers les sujets qui deviennent dans ce cadre porteurs des modifications potentielles des conditions de travail avec la démarche initiée par Ivar Oddone dans les années 70 sur pendant le temps de formation des délégués syndicaux de l’usine Fiat (Oddone et alii, 1981). C’est dans cette perspective que s’inscrivent les recherches menées au sein de l’équipe de clinique de l’activité du CNAM, qui a développé pour ses interventions, entre autres, la technique de l’instruction au sosie forgée par le psychologue italien (Clot, 1999a, 2000; Scheller, 2001).

 

L’analyse du travail en clinique de l’activité

Nous voudrions à présent explorer la manière dont l’analyse de l’activité peut devenir un instrument psychologique (Vygotski, 1930/1985; Rabardel 2002) pour les travailleurs. Mais il faut avant tout tirer leçon des obstacles qui se présentent à toute analyse de l’activité: toute observation est une transformation de l’objet étudié. Le chercheur, par sa présence modifie les conditions réelles d’observation en s’ajoutant comme destinataire potentiel de l’activité du professionnel. De cet obstacle, la clinique cherche à faire une ressource. Puisqu’on ne peut comprendre sans transformer, on cherche alors à transformer délibérément pour comprendre. L’objet et le but de la compréhension en sortent modifiés, développés: on ne cherche plus à modéliser une activité générique, à en faire la théorie avec ses caractéristiques essentielles et accidentelles, mais à la développer pour comprendre les lois du développement de l’expérience.

Les termes de formalisation de l’activité peuvent alors être écartés de la tentative de caractérisation du travail réalisé dans le cadre méthodologique de la clinique de l’activité. Il s’agit plus de la déformer pour lui donner la possibilité de suivre un autre cours. Plus qu’une explicitation de son expérience de travail dans un cadre de formation, il s’agit ainsi de la considérer autrement pour lui donner l’occasion d’entrer en développement.

Toute la difficulté est alors de transposer cette expérience vécue d’une analyse de sa propre activité en moyen de vivre d’autres expériences (Vygotski, 1925/1994), en opérateur de développement de son activité en situation réelle de travail, autrement dit d’obtenir des effets durables. C’est pourquoi le dispositif de base de l’analyse de l’activité s’enrichit d’une seconde “variable”: le collectif professionnel comme “destinataire de secours” (Bakhtine, 1984) avec lequel le sujet peut continuer à “travailler” son activité au delà des échanges avec le chercheur. Ce mouvement que nous venons brièvement de retracer rejoint les perspectives introduites par Vygotski (1978) pour étudier le développement. Insistant sur la différence entre le développement apparent et le développement réel, entre les manifestations et l’essence du processus, il invoque la nécessité d’élaborer de nouvelles méthodes pour rendre le processus observable. Ne pouvant l’observer pour lui-même, le principe est de jouer le jeu du développement, autrement dit d’intervenir sur l’activité du sujet et d’étudier ses transformations sous l’action de l’expérimentateur. De la sorte, on “provoque ou crée artificiellement un processus de développement psychologique” (id., p. 62). Le processus n’est pas dans ce sens observable directement, mais pas la médiation du protocole (méthode indirecte).

De ce fait, le dispositif méthodologique que nous allons présenter pourrait être qualifié en suivant Vygotski d’expérimental-developpemental. Nous limiterons ici notre description aux les expérimentations de terrain en autoconfrontation croisée. Cette méthodologie historico-développementale est basée sur trois phases qui visent à donner plusieurs développements potentiels à l’activité.

Dans une première phase, l’activité fait l’objet d’une observation minutieuse dont les analyses sont portées au niveau du collectif pour faire l’objet d’une discussion. On cherche par là même à faire advenir un nouveau rapport à l’activité.

On redécouvre chaque fois que le sujet au travail est porteur d’une histoire et d’une expérience qui n’apparaît paradoxalement à l’observation que comme un ensemble d’automatismes et de routines. Celles-ci sont cependant supportées par des choix et un engagement du sujet dans les dilemmes de son activité. C’est cette redécouverte de son expérience et de sa richesse que la première phase cherche à instruire.

La seconde est consacrée à recueillir des traces vidéo de l’activité sur lesquelles va pouvoir se porter une analyse commune appuyée par des commentaires croisés, à la recherche des différentes manière de faire entre les travailleurs concernés. Du point du vue des sujets engagés dans l’expérience, c’est le moment où leur propre activité devient véritablement un objet de travail et peut acquérir le statut d’instrument psychologique pour repenser l’expérience. Cherchant à explorer les dissonances entre les objectifs, les conceptions du sujet et le travail réalisé, visible, le clinicien du travail soutient l’exploration d’autres possibilités laissées en friches dont il sont cependant porteurs. Il ne fait que réveiller par son questionnement les autres possibilités de l’action, permettant aux sujets de re-parcourir des impasses qui, considérées comme incontournables les conduisent à la résignation, en cherchant en eux-mêmes et dans leur milieu les ressources leur permettant de s’en affranchir éventuellement. Les développements inhibés gagnent alors la possibilité d’advenir. Il apparaît alors aux sujets que les limites de leurs actions sont souvent autant le produit de leur propre activité que du milieu lui-même.

Ce n’est que dans un troisième temps que la confrontation entre le milieu de travail et le milieu de recherche peut se trouver relancée sur la base de l’interprétation de l’activité concrète. Les concepts professionnels renouvelés par l’analyse de l’activité peuvent trouver dans les concepts scientifiques des ressources pour se généraliser alors qu’inversement, les concepts scientifiques gagnent en précision empirique. Ce mouvement de confrontation ayant pour base l’activité de travail n’a, a priori, pas de limites. Mais l’expérience montre qu’il doit se mesurer à de nombreux obstacles, pris qu’il est dans l’histoire du milieu professionnel face au le réel.

 

L’appropriation d’un genre d’activités

L’analyse de l’activité est donc dans ce cadre un instrument de développement de l’expérience. Mais en quoi peut-on la regarder comme un apprentissage? A notre sens elle relève de l’apprentissage à une condition: celle de ne pas réduire l’apprentissage à l’intériorisation de connaissances mais de le regarder plutôt comme l’appropriation d’un genre d’activités (Bernié, 2001; Clot, 2002) ou, à la manière de Bronckart, comme un “processus d’interaction formative” (2001, p. 150). En effet le dispositif méthodologique que nous proposons aux sujets, comme on va le voir, implique, en tant que tel, un apprentissage de leur part: une appropriation des obligations dialogiques qu’il fixe au travers de l’appareillage technique et discursif qui permet de le mettre en œuvre.

La fonction du chercheur est alors ici essentielle: il incarne dans son activité propre les contraintes du dispositif dialogique. Il est en ce sens un vecteur de l’apprentissage par ce qu’il montre de son rapport à l’objet du travail et aux sujets. L’apprentissage se fait ainsi par “imitation” entendue ici à la manière de Vygotski: comme préparation à mener de façon autonome ce que le sujet réalise d’abord avec et dans la collaboration avec le chercheur, autrement dit comme ouverture d’une zone de développement potentiel. Le dispositif peut alors opérer comme un cadre fondé sur la répétition des activités habituelles à l’intérieur d’un nouveau contexte, adressée à de nouveaux destinataires (chercheurs et pairs). Cette décontextualisation-recontextualisation des activités réalisées est un processus qu’on peut qualifier, à la manière de Bernstein, de “répétition sans répétition” (Bernstein, 1996). En effet, elle est organisée dans la perspective de pousser la répétition au-delà de la répétition. Le dispositif repose sur une instrumentation de l’action conjointe entre les opérateurs et nous d’une part et entre les opérateurs eux-mêmes d’autre part. On peut dire que dans le cadre méthodologique que nous proposons aux travailleurs concernés pour répondre à leur demande, ces travailleurs sont contraints d’entrer d’abord et de mobiliser ensuite un genre d’activité qui les place “une tête au-dessus d’eux-mêmes”, pour reprendre l’expression de Vygotski (1978). Ce cadre méthodologique est d’abord l’instrument d’un genre d’activités scientifiques qui peut devenir à son tour instrument de leur propre action lorsqu’ils parviennent, grâce à lui, à opérer un retournement essentiel: celui qui change les protagonistes de l’observation et de l’interprétation. Ce qui compte, c’est que le ou les sujets “observés” dans leur travail par le chercheur puissent devenir, au bout du compte, les observateurs de leur propre activité. Car c’est par ce renversement, et seulement au cours de ce renversement, que l’expérience vécue peut devenir un moyen de vivre d’autres expériences. C’est ainsi, et seulement ainsi, que se fait jour un développement subjectif de l’expérience vécue: un développement de la conscience (Clot, 2001a).

Le plus important dans l’observation de l’activité vécue c’est moins alors l’observation que la différence entre des observations, moins la première observation que la seconde qui prend la première pour objet. Autrement dit, l’objectif est le développement chez les travailleurs de l’observation de leur propre activité. De même pour l’interprétation: le but n’est pas l’interprétation de la situation par le chercheur mais le développement de l’interprétation de la situation chez les sujets concernés eux-mêmes. Alors l’analyse du travail n’est plus la source de l’action mais une ressource pour soutenir une expérience de modification du travail par ceux qui le font. Bien sûr, pour ce faire, l’observation doit être précise et rigoureusement construite. Le détail devient décisif. M. Bakhtine a bien vu le problème: «une observation vivante, compétente, impartiale, à partir d’un point de vue quelconque, garde toujours sa valeur et sa signification. La partialité et la limitation d’un point de vue (d’un observateur), voilà quelque chose qui peut toujours être rectifié, complété, transformé (inventorié) à l’aide de cette même observation à partir d’un point de vue différent» (Bakhtine, 1984, p. 334). A l’inverse, «le point de vue neutralisé (sans observation nouvelle, vivante) est stérile» (idem, p. 334).

C’est le ressort principal des dispositifs d’autoconfrontation croisée que nous avons mis au point (Faïta, 1997; Clot, 1999; Clot & Faïta, 2000). Ils cherchent à dénaturaliser les points de vue sur l’activité en transformant l’activité d’autrui en ressource pour l’activité de chacun. Cette transformation des organisateurs de l’activité ordinaire de travail se fait dans l’appropriation par les sujets d’un genre d’activité dialogique organisant la controverse sur les dilemmes de l’activité ordinaire. Ce genre d’activité organise une sorte de plurilinguisme professionnel qu’il orchestre contre toute canonisation de l’activité ordinaire afin de provoquer sa réaccentuation dans l’échange. Du coup ce genre d’analyse du travail ne se dirige pas sur l’activité observable pour et par la seule connaissance mais sur l’activité telle qu’elle apparaît quand les travailleurs et les chercheurs dirigent vers elle leurs analyses. C’est le contenu de l’activité d’analyse dirigée vers l’activité ordinaire qui est l’objet de ce genre d’analyse du travail. On s’y trouve contraint de se référer à l’activité non pas comme à une chose mais pour agir avec elle et sur elle.

Un point est pourtant essentiel pour finir de caractériser ce genre d’activité dialogique que nos interlocuteurs doivent s’approprier. Il est orienté vers le réel du travail. Ils s’approprie ce genre en apprenant à s’en servir à l’aide du chercheur qui transforme avec eux le travail réalisé et observé en instrument d’échange entre les sujets pour que ces dialogues professionnels puissent devenir à leur tour des instruments psychologiques nouveaux du travail effectif, au delà du périmètre interlocutoire. Bakhtine nous aidera encore à définir cette composante générique centrale de la clinique de l’activité en auto-confrontation croisée. C’est là sa “règle d’or”: “L’arrachement de la parole à la réalité est destructeur pour elle-même. Elle s’étiole, perd sa profondeur sémantique et sa mobilité, sa capacité d’élargir et de renouveler son sens dans des contextes neufs et vivants. Pour tout dire, elle meurt en tant que parole car la parole signifiante vit en dehors d’elle-même, vit de son orientation vers l’extérieur” (1978, p. 171).

Rien là de spontané. Le cadre méthodologique auquel on peut “se tenir” fixe des obligations. Ces contraintes deviennent des ressources seulement quand l’enveloppe générique de ce cadre est appropriée par les sujets. En définissant ainsi l’objet de l’appropriation que nous organisons avec nos interlocuteurs on peut parler d’un apprentissage générique source potentielle de développement. On pourrait même dire que ce cadre méthodologique est, au regard de l’activité quotidienne analysée, dans un rapport précis: celui d’un “genre second” vis à vis d’un “genre premier”, pour parler comme Bakhtine (1984). On pourrait dire aussi que l’analyse du travail contribue alors à réévaluer les genres qu’elle traverse et même à les retoucher, gestes professionnels compris (Fernandez, 2001). Elle enveloppe le développement. On retrouve en tout cas ici les processus décrits par B. Schneuwly dans un tout autre contexte d’apprentissage de la langue par l’enfant: l’écrit agit sur l’oral en donnant aux enfants “une capacité fortement croissante de contrôler leur propre processus de production langagière par des ‘genres’ spécialisés à cet effet” (1994, p. 165). L’autoconfrontation peut être regardé au même titre comme un genre spécialisé.

Incontestablement il s’agit ici d’un apprentissage source de développement si on entend par là que l’appropriation de ce cadre méthodologique est un moyen de développement de l’activité. C’est une zone potentielle de développement. Mais, grâce à l’exemple ci-dessous on voudrait aller plus loin: au bout du compte, si au début du processus d’analyse, l’apprentissage ainsi conçu est source potentielle de développement, à la fin, le développement devient source potentielle d’apprentissage. Essayons de le montrer.

 

L’exercice philosophique d’un professeur

Nous avons tenté d’appliquer ce dispositif au travail enseignant dans le cadre général d’une recherche en cours à la demande d’un syndicat du second degré et au sein du programme “travail” du Ministère de le Recherche. Classiquement, les méthodes d’intervention dans les milieux de travail sont restées réservées aux entreprises publiques et à l’industrie. Le point de départ du travail menée en collaboration avec deux autres chercheurs de notre équipe (Roger, Roger & Yvon, 2001) a été de proposer d’utiliser ces méthodes pour l’analyse du métier enseignant comme d’autres l’on aussi entrepris par ailleurs (Saujat, 2001; Amigues, 2002; Amigues, Faïta & Saujat 2002).

Nous reproduisons dans la suite des moments de chaque étape de la phase vidéo. Elle a été précédée d’un long travail de co-élaboration avec les professeurs de philosophie alterné avec des séances individuelles et collectives à partir d’observations de classes recueillies chez chacun des sujets volontaires, et ce à raison de six jours par semaine étalés sur trois mois. L’ensemble de ces données pourrait d’ailleurs être ré-exploiter pour alimenter le travail collectif ultérieur.

L’enseignant commence ici un nouveau cours. Le collectif avait retenu pour sélectionner les séquences vidéo trois critères: le rapport à un auteur, le début d’un nouveau cours, un exercice philosophique. Le séquence mobilisée dans l’analyse répond aux deux derniers.

Elle est tirée du travail dans une classe de Terminale S, au début du mois de décembre. L’enseignant a déjà abordé deux thèmes du programme: croyance et vérité, sciences de la nature et sciences de l’homme. Il entame ici une nouvelle partie du programme intitulé: le sujet, la conscience, l’inconscient.

Au lieu de commencer directement par l’analyse des notions, décide de mettre au travail les élèves, de les mettre en présence d’un problème avant d’aborder des contenus de connaissance. Il choisit en l’occurrence de leur proposer un sujet de type bac sous forme interrogative:

L’enseignant écrit le titre du cours au tableau:
“Puis-je savoir ce que je suis?”
Attend que le silence se fasse.

Le choix de la question n’est pas indifférent. Il s’agit d’une question qu’il conçoit comme faisant appel directement à leur propre subjectivité: “Puis-je savoir ce que je suis”. Autrement dit, il y a un double choix: l’enseignant prend ici pour principe que le questionnement doit précéder l’apprentissage et que le cours doit s’inscrire dans les questionnements spontanées, les interrogations existentielles des élèves. Ce n’est pas le point de départ qui est pris à chaque fois. On dira ainsi que le savoir-faire de l’enseignant puise dans différentes variantes disponibles et que sur le thème précis de l’inconscient, la conscience, le sujet, c’est le choix qui lui paraît le plus pertinent. Ici, le choix est clairement de co-construire le cours avec eux afin que chacun puisse y inscrire son activité. L’objectif est de construire le sens de la question avec les élèves au lieu de le présenter comme une donnée de fait. Il n’y a pas de justification de la notion. La question posée vise à se passer de cette médiation. C’est une question qui – parce qu’elle mobilise le “je”– est conçue comme pouvant être appropriée par tous.

Sans doute, le dispositif a-t-il une histoire et répond-t-il à des préoccupations qui ne sont pas directement lisibles dans la séquence filmée. On peut comprendre par exemple que c’est dans le souci que les contenus philosophiques fassent sens pour les élèves que le professeur passe par une médiation. Il part du constat que les objets philosophiques ne sont pas directement compréhensibles, quand bien même il s’agit là d’élèves de Terminale S réputés meilleurs que d’autres, plus sérieux, mais aussi plus “scolaires” et moins spontanés.

Pour le dire rapidement, dans la question, “Puis-je savoir ce que je suis”, les termes puis-je renvoient à l’inconscient, savoir à la conscience, et le je et ce que au sujet. Reste à trouver la problématique, autrement dit le conflit ou la contradiction qui fait de cette question une question philosophique, c’est-à-dire ouverte.

Il parle à ce sujet d’une phase de brouillon. Le but est d’ancrer le cours dans leurs savoirs et leurs préoccupations, ou, comme il le dit lui-même: “qu’ils aient l’impression que la problématique, ils l’aient découverte eux-mêmes et qu’elle ne vienne pas de l’extérieur” pour s’imposer à eux. Il les guident dans cette découverte. Il y a donc un objet commun à partir duquel, ils vont travailler, ensemble, en s’appuyant sur les (leurs?) conceptions courantes sur la question et, en les faisant jouer les unes contre les autres, arriver à un questionnement philosophique. Tel est l’objectif, la raison d’être du dispositif qui s’appuie sur des opinions pour aller vers l’élaboration philosophique, ou dans un vocabulaire vygotskien, qui va des concepts quotidiens aux concepts scientifiques.

Mais, contre tout attente pourrait-on dire, le dispositif ne fait pas mouche.

Prof: Alors, quelles réactions? (…)
Elève 1: “ce que”, ce n’est pas “qui”.
Prof: Alors première remarque méthodologique, attention, la question n’est pas “qui”, la question est: “ce que”. En même temps fait une accolade sous le terme “ce que” et écrit dessous “qui?”. Et alors, c’est quoi la différence?
Elève 1: Qui, c’est l’identité, ce que c’est…
Elève 2: une nature
Prof: Bien. Alors, on a une première distinction (trace deux traits sous le terme “qui”, écrit identité sous l’une des branches de la distinction). Qui, c’est la recherche de (efface la seconde branche de l’alternative), pardon, d’une identité, (trace une flèche partant de “ce que” et écrit au bout de cette flèche le terme nature), ceque, c’est la recherche de, nous dit G., d’une nature. (souligne l’un et l’autre des termes et fait un trait de séparation entre les deux). Alors, est-ce que quelqu’un peut faire la différence entre une identité et une nature?

Ne connaissant pas les intentions de l’enseignant, ses objectifs, l’histoire de ses choix pédagogiques, il est difficile à l’observateur extérieur de rentrer dans cette activité. Le commentaire s’est donc déclenché à partir de traces observables, plus précisément à partir d’un geste en 6, le geste de tracer une alternative sous “qui” et d’en effacer une branche aussitôt.

L’élève distingue deux éléments que l’enseignant voudrait engendrer du même. Son geste trahit une intention déçue: tenir ensemble la question de l’identité et celle de la nature subsumées sous le même terme “qui”, alors qu’il est conduit, au travers de l’intervention de l’élève en 4 à les associer de manière exclusive (d’un côté nature avec “ce que” et de l’autre identité avec “qui”).

Dans la première auto-confrontation, le professionnel doit ici en quelques secondes faire face au caractère non efficient de son dispositif de cours. Alors que tout est préparé pour que les élèves répondent en exprimant leurs opinions immédiates, leur participation prend la voie de l’analyse technique, méthodologique. Il y a là une confrontation inattendue de genres d’activités différents. Comme le dira plus tard son collègue, ils répondent en tant qu’élèves, se coulant ainsi dans un modèle d’activité, au lieu de répondre selon une modalité qui serait celle de tous les jours.

Prof: En fait, c’est pas très clair dans ma tête, si “qui je suis?” est en dehors du sujet ou pas. C’est-à-dire que pour moi, il faut choisir quand on pose la question “Puis-je savoir ce que je suis?”, il faut choisir, on peut pas dire en même temps “Puis-je savoir ce que je suis?” et “puis-je savoir qui je suis?”, mais je ne suis pas tout à fait prête à exclure le puis-je savoir QUI je suis” du sujet.

Chercheur: Quand tu dis que ce n’est pas clair, c’est que tu vois le sujet, à la fois la question de la nature et de l’identité?

Prof: Voilà. Je ne suis pas prête à exclure, et quand elle fait la distinction, quand c’est le première distinction qu’elle fait, d’abord cela m’embête parce que c’est pas cela que j’attends du tout, comme type de réponse au départ, c’est-à-dire qu’ils sont très méthodos, enfin, elle, elle est très méthodo, donc elle part directement dans l’analyse, dans l’analyse au sens détaillé du terme. Elle joue pas du tout sur la première réaction que l’on peut avoir. La question que j’avais posée, c’est quelle est la première réaction que l’on peut avoir au sujet, et moi j’attends, mais j’attends naïvement, parce que je sais que cela n’est jamais cela qui vient, en fait. Mais je continue à attendre des réponses, par exemple, ou des opinions, des choses comme cela sur lesquelles on peut travailler et ils répondent systématiquement pas par des réponses, mais par des éléments d’analyse. Donc, je les prends parce que c’est ça leur réponse. Mais là, cela m’embête parce que l’élément d’analyse, c’est justement sur une distinction qui ne m’apparaît pas forcément, enfin qui doit être faite, mais qui ne m’apparaît pas préciser le problème, parce que justement, je n’exclus pas du sujet, “puis-je savoir qui je suis”.”

On peut résumer son commentaire en plusieurs points successifs:

– Il n’attendait pas cette réponse, mais cela ne l’étonne pas.

– Il a l’habitude de recueillir des éléments formels, des analyses au lieu des réponses ou des réactions qu’il attend.

– Si le type de réponse ne l’étonne pas, le fait que l’analyse porte sur la distinction entre ce que et qui, nature et identité, le surprend beaucoup plus.

– Cette réponse l’embarrasse. L’élève pose une distinction qui devrait naturellement le conduire à exclure du sujet la question de l’identité, alors que telle n’est pas son intention, bien au contraire. La suite de la manœuvre consistera à rendre problématique cette distinction pour maintenir la question de l’identité “qui” dans le sujet, et revenir ensuite à l’intitulé premier du sujet.

Il craint d’autre part que ce rapport méthodologique à la question lui fasse perdre son sens existentiel. C’est en partant du sens vécu de la question, et non de sa signification logique qu’il espère retenir l’attention et l’implication de chacun dans la construction de la problématique. Son objectif est donc d’ancrer le cours dans leurs préoccupations individuelles.

Nous dirons à partir de ces analyses qui ramassent les commentaires du professeur dans la première autoconfrontation que son choix est de partir des concepts quotidiens, du sens de la situation, de la mise en questionnement de ses concepts dans une activité critique et réflexive pour aller vers l’apprentissage, les concepts scientifiques et les significations.

Comme il le dira plus tard, en 26, cela vient trop tôt. Cela l’arrange que cela soit posé, mais pas à tel moment, pas dans une perspective d’exclusion.

aborder ces notions du programme (le conscient, l’inconscient, le sujet) avec l’obligation implicite d’aborder certains auteurs de la tradition philosophique (Descartes, Freud, Pascal et Spinoza de manière facultative) et certaines distinctions importantes (entre avoir conscience et savoir, nature et identité). La tâche redéfinie est d’aborder ces notions en partant des élèves pour que ce cours fasse sens pour eux tous. La tâche effective est un retournement du cadre et une tentative pour rattraper l’exploration des élèves dans une direction qui ne lui convient pas.

Plusieurs directions sont alors explorées dans son commentaire pour expliquer que le cours ne prenne pas la direction souhaitée: il n’est pas assez directif au sens où les règles de l’exercice, les attendus ne sont pas suffisamment énoncées. Il fait alors retour sur la bande vidéo pour réécouter les questions qu’il pose pour lancer l’analyse. Il les juge alors trop nombreuses, au risque de le rendre flou aux yeux des élèves qui se réfugieraient, pour les meilleurs, dans la méthodologie.

C’est d’ailleurs une première hypothèse à laquelle le mène ses propres préoccupations sur le questionnement (ouvert, fermé) dans l’exercice de la classe. On pourrait en faire une autre peut-être plus naïve: s’agissant d’un titre de cours formulé sous la forme d’un sujet de dissertation, les élèves recyclent leurs apprentissages méthodologiques pour les éprouver. Nous sommes au mois de décembre et entre l’activité des élèves et celle que leur propose leur enseignant s’intercalent celle menée lors des séances méthodologiques. Il n’est donc pas étonnant finalement que les élèves n’aient plus ce rapport spontané à la question en essayant d’y répondre, alors même qu’on leur a appris d’une part à ne pas chercher à donner de réponse directement à une question estampillée “philosophique”, et d’autre part à utiliser des outils d’analyse. Les “mouvements génériques”, pour reprendre l’expression de E. Bautier et F. François (1999, p. 159) sont ici contrariés.

Comme il l’énoncera dans l’autoconfrontation croisée avec son collègue, il essaie de faire appel au rapport qu’ils pourraient avoir à la question (toute question appelle une réponse) alors qu’ils ont déjà (pour les meilleurs, pour la plupart) intégré un autre rapport, qui est aussi le sien, celui de passer par la médiation de distinction, de définitions, autrement dit de différer la réponse en construisant un rapport formel (et pas simplement de contenu) à la question, au risque d’en perdre le sens général.

L’autre direction que pourrait prendre l’analyse est que cette réponse interpelle son rapport au sujet. L’élève, par sa réponse introduit une distinction légitime d’un point de vue de l’analyse stricte des termes, mais décalée quant au contenu. Une vraie question philosophique court derrière: qui (l’identité) est-il distinct du ce que (la nature de)? Mais dans les contenus de cours prévus par l’enseignant les deux aspects sont liés. Il lui paraît difficile d’explorer la question de la nature en laissant la question de l’identité de côté. L’auto-confrontation croisée offre alors l’occasion de revenir sur cette séquence de son activité. Visionné par un pair, la séquence change à nouveau de statut et en changeant de contexte et, peut prendre un sens nouveau:

Prof 2: Tu as un noyau d’élèves qui a la capacité de se situer dans ce dialogue.

Prof 1: Un effet entraînant pour le reste.

Chercheur: Tu en avais conscience de ce que dit Michel ou tu le découvres là?

Prof 1: Ce que je découvre, c’est l’aspect, mine de rien, on a pris un point de départ, parce que le point de départ qui est pris là, je ne m’y attendais pas du tout, je suis partie, cela ne m’arrangeait pas du tout qu’elle parte de cette histoire de “ce que” et de “qui”, etc., bon, bref. Donc, là, je vais complètement à l’aveuglette parce que ce n’est pas du tout ce que j’attendais comme réponse au départ, et en fait, ce dont je m’aperçois là, c’est qu’il y a un ordre, une progression, du “ce que”, de nature/identité, espèce/général, espèce/individuel, espèce/individu quoi. Je me dis tiens, on prend quand même le temps et on avance progressivement par rapport à ce qui vient d’être dit, on fait un petit pas, bon. C’est ça, dont je m’aperçois. Je me dis, c’et pas totalement incohérent, voilà.

Prof 2: Ah, bah, non. En plus, je trouve que… que cela parte sur le “ce que”, en même temps, c’est…

Prof 1: C’est pas mal.

Prof 2: … c’est pas mal. C’est quand même ce qui peut poser problème dans… Enfin, ce qui peut être exactement, je dirais le point de confusion, hein, si c’est mal posé, mal débrouillé dans le traitement d’un devoir. Cela peut être un point sur lequel se font des choix qui peuvent mener l’élève plus ou moins loin du sujet.

Prof 2: C’est bien que cela soit posé, que le doigt soit mis sur la difficulté.

Prof 1: Tu vois, toi tu disais, moi j’ai un problème avec liberté, et bien moi j’ai un problème avec cette distinction-là. C’est-à-dire que, enfin, bon. C’est-à-dire que pour moi, elle est pas si… le choix qui consiste à traiter “ce que” et pas “qui” ou à “qui” et pas “ce que”, est un choix que j’ai pas fait, moi.

Chercheur: Là, je comprends plus. Toi tu dis que c’est un bon point de départ, le “ce que”, et toi tu trouves que ce n’est pas un bon point de départ. Je caricature, peut-être. Ce n’est pas ce que tu as dit?

Prof 2: Non, je dis que c’est un bon point de départ au sens où cela pointe ce qui dans le sujet est effectivement, je dirais, comment dire, problématique étrange. “Ce que je suis”, par rapport à une question sur l’identité, par exemple.

Chercheur: Donc, c’est un bon point de départ?

Prof 2: Donc effectivement, cela veut dire que. Cela veut dire qu’ils ne sont pas emportés par leur lecture au point de ne pas lire ce qui est écrit et de partir sur une question, type de psychologie, hein, de connaissance de soi.

Chercheur:Et toi tu...?

Prof 1: Alors que moi, j’attendais qu’ils soient emportés par leurs réactions et qu’ils aient une lecture type “psychologique” pour travailler dessus, pour la rectifier et… or, ils sont partis directement sur un point voilà, qui me conduit à faire une distinction qui m’arrange pas, parce que ce n’est pas une dissertation, c’est un sujet de cours, et dans mon sujet de cours, je vais être amené à parler quand même de l’identité.

Prof 2: Oui.

Prof 1: Tu vois, alors que d’un point de vue méthodologie de la dissertation, on pourrait évacuer carrément la question de l’identité. Enfin , la question de l’identité, au sens “qui je suis”. Ce que moi, je n’ai pas du tout l’intention de faire. J’ai l’intention de la traiter. Et d’ailleurs c’est une confusion que… tout d’un coup, cela me fait penser que l’on m’a souvent reproché dans l’usage de la référence de Descartes. Tu sais, le passage, euh, de de de, le passage par le cogito pour arriver à des questions d’ordre psychologique, alors que c’est complètement hors propos par rapport à Descartes parce que, Descartes, c’est évidemment pas un sujet psychologique. Donc, il y a une espèce de saut que je fais, une espèce de rupture qu’il m’arrive de faire en cours parce que je n’ai pas le temps d’instaurer toutes les médiations pour séparer les deux, etc. Donc, là, j’aurais préféré qu’ils les confondent. Enfin, cela m’arrange qu’ils les distinguent parce que cela me permet de poser la distinction , comme cela, une fois qu’elle est posée, elle est po sée. Mais en même temps, cela anticipe un peu.

La confrontation avec son collègue opère un déplacement. Il est conduit valoriser en 13 le déroulement du cours qui finalement s’enchaîne bien et progresse avec cohérence. Le second enseignant est habité par d’autres préoccupations (10). Sa démarche consiste au contraire à installer un rapport formel au sujet (20 et 22). Par d’autres procédés, le Prof 1 parvient au but que se fixe Prof 2. Il se trouve que dans le cas précis, l’effet et la progression est involontaire. Le premier enseignant entre dans la logique de son collègue (il complète ses phrases en 15). Il se voit donc amener à assumer les effets involontaires de son action. L’effet par accident pourrait – c’est une possibilité qui s’ouvre à partir de cette prise de conscience – être recherché pour lui-même (26).

L’analyse en terme de progression de cours (13, 17-22) se double d’une analyse du sujet (20) . Prenant parti pour une approche méthodologique, il souscrit à la distinction de l’élève et aurait lui-même évacué du sujet la question de l’identité. Le conflit rejaillit: est-il légitime de distinguer l’identité et la nature? Au terme de leur échange, le professeur 1 en viendra à se demander “est-ce que ma nature ce n’est pas mon identité?”. De lui-même il fait donc retour à ces apprentissages disciplinaires et à la manière dont il traite un auteur de la tradition philosophique (26). La distinction entre identité et nature renvoie à celle entre sujet psychologique et sujet universel chez Descartes et au lien, ou plutôt l’absence de lien entre les deux. C’est un point sur lequel l’avait déjà mis en garde l’inspecteur: on ne passe pas facilement de l’espèce à l’individu. On trouvera ce problème récurent sous différentes formes dans toute la tradition philosophique: peut-on déduire l’individu du concept (Platon)? Est que la substance est la forme ou le composé de la forme et de la matière, principe d’indétermination (Aristote)? Qu’est-ce qui est en plus en moi que dans l’espèce? L’individu n’est-il pas une particularisation de l’espèce? On pourrait aussi mentionner le rapport entre génotype et phénotype, phylogenèse et ontogenèse.

Il y aurait finalement deux destins possibles pour ce conflit d’interprétation qui surgit dans l’activité dialogique sur l’activité ordinaire. Soit le développement s’oriente dans la transformation de la situation; par exemple, l’enseignant pourrait reformuler son sujet et proposer “puis-je savoir qui je suis?” en subsumant le concept de nature sous celui d’identité. Paradoxalement, le singulier deviendrait l’objet du questionnement philosophique et non plus le concept.

L’autre voie de développement serait, elle, dirigée vers l’objet même du conflit, la distinction conceptuelle entre identité et nature en essayant de retrouver en arrière plan les différentes formulations théoriques du problème. On pourrait alors proposer de parler d’entrée dans une zone potentielle d’apprentissage pour le professeur: revenir à Descartes? Peut-on déduire l’individu du concept?

Le mouvement irait du développement sous l’effet d’un conflit dans l’activité vers l’apprentissage comme nouvelle ressource indispensable de ce développement. Les concepts scientifiques auraient alors un statut d’instrument pour essayer de dépasser autant que possible ce conflit contenu dans le réel de l’activité. Finalement, en se réappropriant la discipline, l’enseignant serait amené à développer sa réflexion – son activité de pensée – devant et avec les élèves. Le problème qui est le sien, interprété comme un problème philosophique tout court aurait pu être l’objet d’une élaboration collective. Certes, c’est là prendre un risque pédagogique. Mais la philosophie ne consiste-t-elle pas à faire courir des risques aux concepts?

 

Conclusion

Il est temps à présent de tirer les conclusions de notre parcours. On peut les résumer ainsi: les sources et les ressources de l’activité des sujets changent en cours de route. C’est cette activité simultanément dirigée vers son objet et vers l’activité des autres portant sur cet objet qui est motrice. L’apprentissage d’un genre dialogique disponible pour parvenir à disposer de “l’ordre” qu’il propose est d’abord moyen de développement avant que ce développement ne devienne à son tour moyen pour un apprentissage d’une autre nature: celui des concepts de la discipline. Deux remarques: d’abord aucune causalité linéaire n’existe ici. Ces passages sont potentiels et jamais strictement prédictibles. Ils sont exposés à des empêchements de tous ordres, que ce soient les buts fictifs qui peuvent garder les sujets prisonniers d’un développement contrarié (Vygotski, 1925/1994) ou encore la carence et l’inefficience des moyens de l’apprentissage. Ensuite, c’est bien l’activité dirigée des sujets qui est le moteur de cette migration de l’apprentissage dans le développement et du développement dans l’apprentissage. Dans l’activité du sujet, ils ne sont pas sédentaires mais plutôt nomades, pour reprendre le vocabulaire que Vygotski utilisait à propos des émotions dans la vie psychologique (Clot, 1999 c).

En réalité nous retrouvons là le concept de développement défini par Vygotski comme un mouvement de transformation de l’interne en externe et réciproquement. Mouvement dans lequel, en changeant de statut, chaque fois qu’ils passent l’un dans l’autre, ils se transforment mutuellement. C’est là “un processus dialectique complexe, caractérisé par une périodicité elle-même complexe, une disproportion dans le développement des fonctions considérées isolément, des métamorphoses ou des transformations qualitatives de formes en d’autres, un complexe entrelacs de processus d’évolution et d’involution, de complexes entrecroisements des facteurs internes et externes, une complexe succession d’adaptations et de victoires remportées sur les difficultés.” (Vygotski, 1931/1981 – trad. L. Sève, 2002, p. 259).

Dans le cas étudié, sous l’effet d’un développement de la pensée du sujet sur son activité, conquis dans la zone potentielle de développement de l’auto-confrontation, s’ouvre alors une zone potentielle d’apprentissage: l’enseignant oriente sa réflexion vers les concepts et l’histoire de sa discipline pour se mesurer aux conflits en souffrance dans son activité. Apprentissage et développement semblent ici obéir à une alternance fonctionnelle dans l’activité du sujet. La seule unité qu’on puisse leur trouver réside dans le cours de cette activité, dans son histoire possible ou impossible. Entre eux on peut écrire sans risque qu’il existe une contradiction plutôt qu’une concordance. Mais cette contradiction offre une possibilité. Ils ne sont pas taillés sur le même moule. Mais, justement, il y a donc un devenir, en partie imprédictible, de l’apprentissage dans le développement et inversement. Il ne faut donc pas ériger en antinomie ce qui n’est jamais qu’un décalage historique où, justement, se produit l’activité d’appropriation du sujet. Cette manière de poser le problème réunit dans les conflits de l’appropriation, une psychologie du développement et une psychologie de l’apprentissage. Contre tout dualisme mais aussi à l’opposé d’un monisme amorphe, on peut définir cette psychologie comme une sorte de monisme historique.

 

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Endereço para correspondência
E-mail: clot@cnam.fr

Recebido em outubro de 2004
Aprovado em outubro de 2004

 

 

* Professeur de Psychologie au Conservatoire National des Arts et Métiers - CNAM, Paris
Responsable de l'équipe de Clinique de l'Activité du Laboratoire de Psychologie du Travail du CNAM

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