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Estilos da Clinica

versão impressa ISSN 1415-7128versão On-line ISSN 1981-1624

Estilos clin. vol.25 no.1 São Paulo jan./abr. 2020

http://dx.doi.org/10.11606/issn.1981-1624.v25i1p77-88 

10.11606/issn.1981-1624.v25i1p77-88

DOSSIER

 

Entre exil et exclusion : un dispositif d'accueil pour les élèves poly- exclus en Collège

 

 

Aurélie Maurin SouvignetI

IMaîtresse de conférences en Psychologie, Université Paris 13, Comue Sorbonne Paris Cité, Villetaneuse, France. Email: aurelie.maurin@yahoo.fr

 

 


RÉSUMÉ

Ce texte s'appuie sur une recherche-action menée dans un collège francilien. L'objectif était la transformation des pratiques de l'équipe pédagogique, afin qu'elle soit en mesure de mieux accueillir les collégiens exclus d'établissements voisins. Les acteurs de ce projet ont été réunis pendant une année scolaire selon trois modalités : l'équipe pluridisciplinaire s'est régulièrement réunie en groupes d'analyse des pratiques ; des groupes de parole mensuels étaient destinés aux adolescents ; des assemblées générales ont ponctué l'année. Nous montrerons comment les objets médiateurs, ici des objets chargés culturellement et subjectivement car expressément choisis par les participants, ont contribué comme autant de surfaces de réflexion, à la constitution d'une culture groupale et à l'élaboration des liens entre les parcours d'exils et d'exclusions des collégiens. Le processus mutatif ainsi engagé a permis que la fonction formative de ces groupes s'exerce selon trois dimensions : auprès des jeunes qui y sont inscrits, auprès des équipes qui peuvent ainsi se sentir soutenues, et auprès de l'institution reconnue dans sa potentialité instituante.

Mots clefs. Analyse de la pratique ; culture ; relation adulte adolescent ; processus créatif.


 

 

Ce texte s'appuie sur le temps fort d'une recherche-action, centrée sur un dispositif pilote de remédiation dans un collège francilien. Elle avait pour objectif d'accompagner la transformation des pratiques d'une équipe pédagogique, afin qu'elle soit en mesure d'accueillir dans les meilleures conditions des collégiens exclus d'établissements voisins en cours d'année.

Dans cette perspective, une dizaine d'enseignants, l'assistante sociale, l'infirmière et la principale du collège se sont engagés dans un projet intitulé par eux « Les autres et moi ». Ce dispositif était financé par le Fond Social Européen (FSE) et c'est dans ce cadre que ces professionnels m'ont adressé collectivement une demande d'accompagnement par le biais d'une formation (volet classique des projets FSE) qui a pris les traits d'une recherche-action.

La création et la mise en œuvre d'un tel dispositif suppose de la part des intervenants un engagement spécifique, exigeant un décentrement au regard des pratiques plus classiques menées par ailleurs par ces professionnels (enseignements disciplinaires, accompagnement individualisé d'élèves en difficultés etc.). Et c'est donc selon les principes de co-construction des méthodes et de co-production des connaissances que les acteurs de ce projet ont été réunis pendant une année scolaire selon trois modalités de travail groupal. L'équipe pluridisciplinaire s'est régulièrement réunie en Groupes d'Analyse des Pratiques (GAP) qui constitueront l'objet principal de ce texte; se sont parallèlement tenus des groupes de parole mensuels destinés aux adolescents ; des assemblées générales (séance plénière) ont ponctué l'année. Ce décentrement semblait en effet mériter d'être triplement mis au travail collectivement afin d'appréhender au mieux les changements qu'il permet au niveau des pratiques professionnelles mais aussi du travail en équipe pluridisciplinaire et encore de la relation avec les jeunes et entre jeunes.

 

« Les autres et moi », un projet de remédiation innovant au collège

Le collège d'Ile de France à l'origine de ce projet est marqué par une forte hétérogénéité. Cet établissement se situe au carrefour de plusieurs quartiers d'une ville de la région Seine Saint Denis. Les familles des élèves qui y sont scolarisés relèvent d'une infinité d'origines : sociales, culturelles, religieuses, économiques ou autres, et cela est également vrai pour les personnels (enseignants, administratifs, éducatifs etc.) de ce collège. La majorité des adolescents de cet établissement a connu directement ou par l'intermédiaire de leurs parents un parcours migratoire. Plus nombreux encore sont ceux qui ont des grands-parents nés en Afrique du Nord ou en Afrique sub-saharienne. La grande diversité des profils de ces élèves est plutôt envisagée par l'équipe pédagogique comme un point positif pour ce collège, qui œuvre de longue date pour l'ouverture et le métissage et prend appui sur cette richesse pour penser de nombreux projets (club humanitaire, voyages scolaires, échanges nationaux et internationaux, etc.).

Cette hétérogénéité, que nous pourrions qualifier d'endémique, est encore accentuée par un procédé désormais classique de l'Éducation Nationale qui consiste à transférer des élèves d'un collège à un autre, en cours d'année. Certains élèves sont en effet amenés à quitter un établissement après qu'un évènement souvent violent les aient conduits devant un conseil de discipline qui a pris la décision de les exclure. Ces mêmes élèves sont ensuite inscrits dans un nouvel établissement sur avis du rectorat.

Le projet « Les autres et moi » est né dans ce contexte d'un constat partagé par l'ensemble des professionnels de cet établissement : les élèves arrivant après une exclusion décidée par le conseil de discipline ne parviennent pas à trouver leur place, malgré les efforts communs, malgré un climat favorable dans l'établissement, malgré l'ouverture dont font preuve chacun des acteurs (adultes et élèves pairs) ... Mal inscrits, ils repartent comme ils sont arrivés, par le conseil de discipline ! Certains allant de collège en collège, changeant d'établissement jusqu'à quatre fois dans une même année, et participant à leur corps défendant d'une forme tout à fait pathologique d'errance institutionnelle : leurs exclusions répétées se constituent alors comme un exil au sein même de l'institution Education Nationale.

Partant de ce constat d'échec, et de la souffrance qui y est associée aussi bien pour ces jeunes, que pour leurs familles et pour les professionnels qui les encadrent, une dizaine d'enseignants sous l'impulsion de la chef d'établissement ont imaginé un dispositif dont l'objectif était de mieux accueillir ces élèves afin qu'ils trouvent leur place et restent scolarisés durablement dans cet établissement. Rompant avec le processus traumatique de l'exclusion, le bénéfice ici devait être à plusieurs niveaux :

* primaire : sortir de la spirale du décrochage pour les adolescents et leur famille,

* secondaire : re-narcissicer les professionnels en valorisant leur créativité et leurs compétences en situation limite,

* tertiaire : remplir la mission de service public exigée par l'Institution. Pour ce faire ils se sont engagés dans plusieurs étapes :

* l'accueil d'abord devait être pensé en partenariat avec les familles. Deux entretiens préalables étaient prévus avec la principale puis avec l'Assistante Sociale (AS) du collège.

* un temps de rencontre et d'évaluation devait ensuite être mis en place, en petit groupe de trois ou quatre élèves, sous la responsabilité de trois duos d'enseignants volontaires.

* ce temps de diagnostic débouchait sur un programme d'aide personnalisé toujours animé par les mêmes enseignants pour les mêmes petits groupes qui se déroulait tous les mardis matins, sur une plage horaire aménagée.

* parallèlement les élèves étaient incités, en fonction de leurs centres d'intérêts, à participer aux activités proposées par le collège et en particulier le club nature, la médiation par les pairs, le club sport, le club humanitaire et le journal du collège.

* en sus, l'assistante sociale et l'infirmière devaient organiser des actions de prévention ciblées tout au long de l'année.

* des réunions de régulation internes étaient organisées sous la houlette de la principale certain mardis sur la pause méridienne.

* enfin un temps dit de formation à destination des professionnels restait à construire et c'est sur ce point que cette équipe m'a sollicitée.

Plusieurs réunions préalables ont été organisées avec l'ensemble des professionnels engagés afin de négocier ensemble les modalités de mon intervention : nous avons convenu des trois modalités déjà énoncées.

Le principe de la recherche-action est d'être au plus près de la réalité et du quotidien de ceux qui y sont engagés. Une certaine souplesse relative à l'ajustement permanent aux besoins et aux demandes des participants est donc de mise. Cependant un cadre de travail précis favorise la confiance placée dans la méthode utilisée et potentialise son efficacité.

Il a donc été rappelé que les GAP, initialement inspirés de Balint (1957), tout comme les groupes de parole dédiés aux adolescents, seraient structurés en quatre temps : un premier temps d'accueil destiné d'une part à un retour sur l'entre-deux séances et d'autre part à l'expression des besoins et demandes actualisés ainsi qu'à l'ajustement du calendrier si nécessaire, un second temps de mise en récit de situations rencontrées dans le cadre du dispositif ou connexes à celui-ci, un troisième temps d'approfondissement et d'élaboration de ces situations et un dernier temps de synthèse à partir de la mise en lien des différentes situations élaborées et du repérage des changements de postures et de leurs conséquences sur les pratiques professionnelles.

Nous nous limiterons dans le cadre de cet article à mettre en lumière ce qui a mobilisé l'équipe pédagogique, d'abord dans ses réactions de défiance puis dans l'expressions de ses résistances et enfin dans sa créativité, à élaborer les effets de la rencontre avec l'autre exclu, exilé du monde commun et de ce lieu de transmission des savoirs. Ce parti pris, de nous intéresser plutôt à celui qui accueille qu'à celui qui est accueilli, nous semble particulièrement nécessaire pour faire évoluer les pratiques pédagogiques et éducatives souvent trop rigides pour être ajustées à ceux qui se tiennent aux seuils (des établissements, des classes, des groupes, des apprentissages, des savoirs-êtres etc.). Si les situations de chacun des adolescents inscrits dans ce dispositif « Les autres et moi » restent singulières, il n'en reste pas moins que le projet est le même pour tous. C'est sur ce qui est commun, partageable et partagé, que nous pensons devoir intervenir ici en tant que psychologue ; ce qui est singulier devant précisément le rester.

Nous reviendrons donc sur ce qui a traversé le groupe des professionnels et sur le processus qui lui a permis de dépasser, au moins en partie, les points de butée qui organisaient activement le principe d'exclusion ici dénoncé.

 

Chronique d'un GAP annoncé : ou comment résister à ce que provoque la rencontre avec un autre ?

Le 1er GAP fut l'occasion de reprendre les règles de fonctionnement : la participation de tous, la confidentialité, le principe de restitution des échanges concernant le GAP en dehors des séances, l'écoute bienveillante et le non-jugement. L'essentiel de cette séance consista à exprimer les représentations des professionnels relativement aux adolescents, au dispositif, au GAP eux-mêmes et à leur dimension formative.

L'équipe entra pleinement dans le travail d'élaboration des angoisses sous-jacentes à des représentations assez confuses des places et des missions de chacun. Les statuts et les fonctions habituelles des professionnels, et l'assurance qui leur est associée d'être compétents, à leur juste place, sont bouleversés par le caractère innovant des actions du dispositif. Le fait même d'être réunis, non selon son champ disciplinaire ou son champ de compétence mais bien au titre de participant d'un projet pluridisciplinaire, semblait nouveau et, en cela, troublant. Les assertions relatives aux fonctions et aux statuts laissèrent alors place aux doutes quant aux rôles et aux postures prises. Les questions relatives à l'altérité semblaient jaillir de toute part, donnant raison au choix, fait en amont par la chef d'établissement, d'intituler leur projet « Les autres et moi », chacun étant tour à tour l'autre d'un moi perçu comme vulnérable et isolé.

Les adolescents furent immédiatement présentés dans leur radicale altérité et le cortège de fantasmes que cela suscite fut rapidement convoqué : ils viennent d'un autre collège certes, mais aussi d'une autre culture, d'un autre pays (la totalité de la vingtaine de collégiens inscrits dans ce dispositif avaient connu directement ou indirectement un parcours de migration, nous y reviendrons), ils sont violents, contagieux, inaccessibles, ingérables... et par-dessus tout : ils ne veulent pas être parmi nous !

Ces éléments se sont en outre actualisés dans le transfert, vis-à-vis de la situation de formation, puisqu'il m'a été formulé ce jour-là, dans l'après-coup du temps de négociation précédent, que les GAP devraient être « enrichis théoriquement », afin que les professionnels soient « vraiment formés ». J'étais donc ainsi replacée ou plutôt déplacée dans un rôle d'enseignante, en miroir avec les participants, mais aussi respectivement à une fonction que j'exerce par ailleurs, ce qu'ils n'ignoraient pas. Entre la psy et la prof, c'est à la seconde qu'ils souhaitaient s'adresser, ou plus précisément, c'est à la première qu'ils ne préfèraient pas avoir à faire ! Ce qui de moi leur était le plus étranger était barré et ils me convoquaient dans ce qui leur était le plus familier, alors même que le projet annoncé était de les aider à se décaler de leurs pratiques habituelles pour s'ajuster au mieux aux besoins singuliers de ces élèves en situation d'exclusion. Ils semblaient opérer un repli derrière le vocable « formation » bien repéré dans le volet FSE auquel appartenait mon intervention. Ce faisant, ils ne reconnaissaient pas d'emblé la portée formative de l'élaboration collective de situations complexes et me mettait à l'épreuve. Ce qui était sans doute bien légitime. Plus encore, ils exprimaient leurs craintes vis-à-vis d'un travail de pensé inédit, et des transformations qui pourraient en découler. Je temporisais la réponse à cette demande et différais ainsi sa réalisation en ménageant un à venir, pour eux comme pour moi. Laissant ouvertes plusieurs options possibles autour de ce que recouvrait mon intervention et leur participation, nous posions ensemble un principe d'ouverture qui ne clôturait aucune perspective.

Par ailleurs, l'approche de la première réunion plénière qui devait symboliquement marquer le coup d'envoi des actions du dispositif cristallisa nombre d'angoisses parmi lesquelles celle de la contamination. Les plus jeunes risquent-ils de subir la mauvaise influence des plus grands ? Les adultes risquent-ils d'être débordés et de perdre le contrôle de la situation ? Être en groupe n'est-ce pas prendre le risque d'être exposé et de rendre visible ses failles et ses défaillances ? Voilà les questions qui présidèrent à l'organisation de cette séance plénière inaugurale et qui offraient une double lecture des angoisses : celle du dispositif lui-même et celle du dispositif dans le dispositif (le processus de formation via les GAP) qui était anticipée comme susceptible de les fragiliser. Fantasme qui répondait sans doute à leur sentiment d'être très fragilisés par ces élèves présumés violents et défectueux, eux-mêmes fragilisés par l'expérience multiple de l'exclusion.

Lors du 2ème GAP, (après que les premières actions aient été mises en place), les professionnels ne seront pas en mesure de respecter pour eux-mêmes les règles que nous nous étions fixées ensemble. Il avait en particulier été décidé de n'aborder qu'une seule situation à la fois mais l'urgence d'exprimer toutes les situations rencontrées l'emporta. L'urgence, ou plus exactement le sentiment d'urgence, est à entendre ici comme le symptôme visible de la crise à laquelle ces professionnels font face depuis de nombreuses années sans pouvoir en élaborer les points cardinaux. Chacun semblait avoir un besoin impérieux de dire ce qui avait rendu concret pour lui son engagement dans le dispositif.

Plusieurs situations seront donc abordées. Toutes avaient pour objet les difficultés des professionnels pour rencontrer les élèves du dispositif : soit parce qu'ils ne venaient pas, soit parce qu'ils les confrontaient à de la violence. Ainsi la place de chacun fut re-questionnée, et en particulier les motivations, le désir, la demande de participer à ce travail d'équipe. Certains se reconnaissaient parfaitement dans ce projet, d'autres ne savaient pas ce qu'ils pourraient y apporter. La verbalisation collective du vécu de ces places et postures différentes a permis à tous de prendre la mesure de leurs implications dans ce projet, et la forme de cet échange m'a permis d'éprouver et donc de reconnaître l'état de confusion dans lesquels ces enseignants étaient et par conséquent dans lequel ces élèves devaient être.

A la 3ème séance il fut toujours impossible à l'équipe de ne traiter profondément qu'une seule situation à la fois. Les différentes situations qui furent évoquées traitaient toutes des résistances des jeunes à participer à ce projet. La mise en relation des résistances et des doutes de l'équipe, rendue concrète par l'absence de certains, et la resistance des jeunes à présent discutée, permit de mettre en lumière les premiers mouvements identificatoires entre adultes et adolescents. « Nous nous ressemblons, nous partageons les mêmes émotions et sommes pour le moment assez confus », disaient-ils en substance.

Une expression d'un des membres pour qualifier la souffrance de l'équipe, face à la désaffection des élèves, fut ainsi le moteur de la réflexion : « en passer par là » comme un appel à un travail réflexif mais aussi comme une forme de soumission face à ce qui était vécu comme une blessure narcissique. Cette formule évoque par ailleurs le processus migratoire, c'est-à-dire ici le passage d'un établissement à un autre, que ce dispositif, centré sur la possibilité offerte d'un accueil, cherchait à organiser positivement.

Une demande fut alors énoncée : Comment faire pour que les élèves acceptent ce que nous avons à leur offrir ? Cette demande fut d'abord formulée dans des termes évoquant plutôt une contrainte : « comme faire pour qu'ils obéissent, pour qu'ils cessent de résister », avant de comprendre que, ce faisant, le risque était grand de passer à côté du cœur de ce projet : la rencontre avec l'altérité et donc avec ce qu'elle suppose de respect des subjectivités, et ainsi élaborer l'écart entre le désir des uns et la réponse qui peut y être apportée par les autres.

Selon les principes de la recherche-action il fut recommandé de travailler, dans le cadre du GAP, exclusivement sur le problème posé plutôt que sur la solution à celui-ci. En effet l'idée force était bien de donner les moyens aux participants de trouver pour eux-mêmes et par eux- mêmes les solutions les plus adéquates à partir de la compréhension approfondie des mouvements psychiques et affectifs de chacun et du groupe. Cette contrainte peut également être entendue relativement aux règles de fonctionnement des GAP : Comment faire pour entrer dans ce processus de réflexion ? Allez-vous nous y forcer ? Est-ce une obligation ou une nécessité ? À la question du pouvoir par la force s'associe celle de la séduction. Se conformer au dispositif, se conformer à leur désir, comment négocier un compromis pour que le travail réflexif s'engage ?

La 4ème séance marque un moment fort et important du travail au travers de l'expression d'une dépressivité généralisée chez les professionnels. Seuls à être assidus dans les GAP, les enseignants ont exprimé leurs désarrois face à ce qu'ils ressentaient comme des attaques de l'extérieur. Si cela est le signe fort qu'un groupe s'était constitué, c'est aussi l'expression douloureuse de n'être pas reconnu et compris dans sa tâche et dans son engagement dans ce projet singulier et original au sein de l'établissement. Ces attaques furent encore éprouvées de l'intérieur sans pour autant être élaborées. En effet certains intervenants de ce dispositif se sont très vite absentés de leurs missions propres mais aussi des GAP et en particulier l'assistante sociale et l'infirmière.

Le miracle attendu ne se produit pas et l'équipe prit la mesure de la réalité de la mission à accomplir : changer de modalité de travail (en petit groupe plutôt qu'en classe, en équipe plutôt que seul, avec des objets variés plutôt que des objectifs spécifiés etc.) implique un remaniement profond de son identité professionnelle et la confrontation avec ceux qui ne font pas ce travail.

Le processus d'identification aux jeunes gens en situation d'exclusion et d'exil était à son paroxysme mais ne pouvait encore être élaboré et mis au travail.

Or, lors de la réunion plénière (regroupant élèves et professionnels concernés par ce dispositif, soit environ 30 personnes) qui eut lieu ensuite, le bilan d'étape des adolescents fut paradoxalement positif : alors même que l'équipe dit souffrir de leur manque d'investissement, eux se disent satisfaits et impliqués. Le contraste est frappant et je questionne les jeunes sur leurs absences : tous évoquent leurs difficultés à se repérer dans le temps et dans l'espace et disent ne pas savoir où et quand ils sont attendus. Ce point précis donnera lieu à la mise en place par l'équipe de plannings individualisés, mais au-delà de cette réponse organisationnelle, ce qui est ici révélé, c'est une question plus existentielle : Où sont-ils attendus ? Et par qui ?

La 5ème séance est une séance charnière. Le bilan positif dressé par les adolescents a un effet de relance auprès des adultes, qui peuvent reconnaître que « quelque-chose se passe, même quand tout ne se passe pas comme on l'imaginait ». La certitude qu'un lien est dorénavant établi avec les adolescents va permettre aux adultes de repenser leurs objectifs, qui vont se centrer dorénavant davantage sur la relation que sur les savoirs.

Ce GAP sera ensuite dédié au choix d'un thème de travail pour les séances à venir et à la modalité de traitement de celui-ci. Les questions relatives à l'histoire singulière des adolescents, mais aussi aux parcours professionnels des enseignants, ont nourri particulièrement ces échanges. Les détails de l'histoire de chacun sont en effet peu connus de l'équipe. Les adolescents sont certes peu diserts... et seules la principale et l'assitante sociale ont rencontré les parents, tout en restant discrètes ce qui leur a été confié. S'ajoute à cette méconnaissance manifeste l'hypothèse que dans le parcours d'exclusion, comme dans le parcours d'exil, quelque chose de l'histoire des sujets vient à choir. Ce qui choit est toujours en quête d'une place, et c'est précisément ce que ce dispositif soutient sans toutefois pouvoir pleinement l'afficher.

Après de nombreux échanges l'équipe s'accorde à travailler sur le double thème : placement- déplacement qui présente l'avantage de condenser la situation de ces élèves avec celle des professionnels à la fois placés là (dans cet établissement, dans ce dispositif) et déplacés d'un ailleurs (un autre établissement, un autre dispositif, par exemple la classe classique...). Ce thème comprend aussi en creux ce qui anime depuis le départ les discussions : « D'où viennent ces adolescents, qui sont-ils, comment leur faire une place, comment leur laisser la possibilité de s'en saisir ? ».

Nous convenons que nous travaillerons en premier lieu à partir de situations directement reliées à ce thème et que nous l'aborderons au travers de supports culturels dans un second temps. Nous convenons en outre qu'une dernière séance sera dédiée à l'écriture d'un bilan interne. Ce faisant nous pouvons ensemble nous déjouer de la scène fantasmatique de départ où je serais la professeure qui professe et qui doit les enrichir théoriquement, eux, les élèves défaillants, et son autre face : la « psy » qui analyse et confronte en public à la folie privée.

La 6ème séance fut marquée par l'opération de déconstruction des notions de « placement » et « déplacement » qui avaient été au cœur des séances d'analyse des pratiques précédentes. Chacun des participants évoqua librement ces représentations et put réagir sur celles évoquées par les autres. Ce grand tour de table avait pour objectif de confronter les points de vue mais surtout d'enrichir la compréhension et l'appréhension de ces deux notions aux regards de la variété des expériences de chacun. Ce qui fut retenu c'est avant tout la violence comprise dans l'exclusion mais aussi celle de l'inclusion, des professionnels et des adolescents, ce fut encore et surtout la nécessité d'une transformation des représentations et des pratiques pour travailler cette violence et avec cette violence.

La 7ème séance fut entièrement consacrée à l'illustration du précédent travail de déconstruction des notions de placement-déplacement, via des supports culturels variés. Chacun des participants étaient invités à présenter à tous un objet de son choix devant lui permettre de synthétiser ce qu'il comprenait par ces termes et d'explorer ce qui de lui-même était engagé dans ce qu'ils impliquaient. Un temps de discussion était ensuite ouvert à tous.

Des supports visuels (tableaux, sculpture), audio (musique), vidéo (film, documentaire), mais également des textes théoriques, des textes littéraires, des objets du quotidien, des objets devant servir une expérimentation scientifique ont été apportés et partagés. Leur choix a été commenté et ils ont servi de support à la discussion. Tous avaient le mérite de faire se rencontrer l'identité personnelle et professionnelle des participants, illustrant en cela le choix du thème dans ses aspects les plus condensés. L'objectif de ce travail était en effet de permettre à chacun d'aborder ces thématiques à partir de son point de vue singulier. C'était l'occasion de faire se rencontrer l'adulte et le professionnel. L'écart et les tensions entre l'adulte et le professionnel ayant fait l'objet de nombreuses élaborations au fil des groupes d'analyse des pratiques, ce fut également l'occasion d'un bilan de ce qui avait été traversé depuis les premières rencontres, et par exemple : comment trouver une juste distance entre ne pas essentialiser les difficultés de ces jeunes gens tous issus de l'immigration sans banaliser les parcours traumatiques de ces familles. Bilan en cours de travail qui permettait de mettre au jour les résistances collectives et singulières et de trouver avec et pour chacun le moyen de s'en émanciper. Cette journée de travail fut particulièrement riche émotionnellement et intellectuellement pour chacun tant les objets mis en partage étaient chargés d'affects et d'histoire. Sans jamais perdre de vue ce que nous faisions ensemble -élaborer des pratiques pédagogiques efficientes pour accueillir au mieux des jeunes gens en souffrance- nous avons donné du corps, de la chair et un supplément d'âme à cet engagement. Moment fondateur pour l'équipe, il marqua un tournant dans le positionnement des enseignants qui ne se situèrent plus dès lors ni dans une attente passive ni dans une volonté inadéquate d'aide, mais dans une offre d'écoute ajustée à ce qui pouvait leur être adressé comme demande.

Je soutiens ici l'hypothèse que cela fut rendu possible parce que la demande propre de cette équipe, explicitée en cours de collaboration, de mettre au travail une thématique traitée à partir de supports de connaissances extérieurs, plutôt que des situations élaborées à partir des éprouvés singuliers de chacun, a été reçu cliniquement dans ses aspects défensifs autant que créatifs.

Ne pas céder sur la fonction de répondant de l'analyste en accueillant positivement cette demande comme une opportunité clinique plutôt que comme une attaque du cadre, a permis de rendre opérant cet espace de travail. Cette posture ne cède pas pour autant aux sirènes de la séduction en donnant satisfaction à la demande, mais ouvre la voie à la conception d'une méthodologie originale et innovante, seule susceptible de répondre de cette situation aux limites.

En effet, si les GAP dans leur forme classique (Balint, 1957) confrontaient le groupe aux résistances par eux dénoncées des adolescents et des autres professionnels, ils faisant surtout écran aux résistances propres du groupe et des sujets de celui-ci liées au sentiment d'échec du travail de culture. C'est donc le recours aux objets culturels (Diet, 2010), comme objets actifs, et activateurs de représentations, qui a ouvert la voie à la symbolisation de la violence, favorisant la création d'un fond culturel commun qui faisait défaut dans la relation pédagogique avec les élèves autant qu'entre les professionnels. Ce moment charnière du processus s'est révélé être un récepteur et un transformateur des affects archaïques incorporés qui barraient la potentialité du changement.

 

D'ici et d'ailleurs

Les savoirs constitués, tels que les enseignants les transmettent classiquement dans leurs pratiques sont en quelques sortes des objets culturels fortement investis et exposés aux attaques de ces élèves décrocheurs, violents, exclus, migrants, susceptibles de détruire établissement, enseignants et savoirs. Comme une greffe qui ne prendrait pas. Or ces élèves trimbalent presque tous une histoire d'exil. L'investissement des objets culturels est pour eux soumis au paradoxe d'être d'ici et d'ailleurs, c'est-à-dire au risque d'être de nulle part. Identifiés massivement à leur histoire singulière et à celle de leurs parents et grands-parents, ces adolescents qui se retrouvent en situation d'exil scolaire sont en proie à la répétition traumatique. Le mécanisme repérable ici est celui de l'emboîtement. Les professionnels aux prises avec des processus complexes d'identification se retrouvent eux aussi en situation d'exil professionnel. « Condamnés à investir » (Aulagnier, 1986), pour les soutenir dans leur tâche primaire de transmission il faut les restaurer dans leurs rapports aux savoirs, c'est-à-dire aux objets culturels transmissibles. C'est ce que cette séance a permis en ré-organisant le processus autour d'objets à la fois intimes et partageables.

Ce processus de transformation ainsi engagé a permis que la fonction formative de ces groupes s'exerce selon trois dimensions : auprès des jeunes qui y sont directement inscrits, auprès des équipes qui peuvent se sentir soutenues par de tels projets, et auprès de l'institution reconnue dans sa potentialité instituante. Par-là, c'est la tension entre subjectivation et aliénation propre à tous les dispositifs d'intervention qui peut être questionnée.

Les dispositifs ont toujours pour objectif de produire le sujet, c'est-à-dire la subjectivation. Ils se situent du côté de l'économie, entre praxis et doxa, ils se veulent utiles à l'homme pour organiser et orienter ses gestes, pensées et discours. Notre temps connaît une prolifération des dispositifs qui aliènent nos subjectivités. Pour se libérer de ce joug, Agamben (2007) envisage l'idée d'une profanation, d'un retour au profane, dans le sens d'une restitution au libre usage des hommes de ce qui est sacré. La profanation, selon cet auteur, serait un contre-dispositif qui restitue à l'usage commun ce que le sacrifice avait séparé. Les dispositifs ne visent plus les processus de subjectivation mais de désubjectvation et d'assujettissement. L'idée est donc de déjouer les dispositifs désubjectivants pour en penser de nouveaux qui eux seraient subjectivants.

Le dispositif se propose, le cadre se pose et le contexte s'impose (Benghozi, 2006). La visée est-elle le changement, et quel changement, ou l'adaptation et quelle adaptation ?

Nous nous trouvons ici dans une situation d'extension de la psychanalyse :

sur la base de dispositifs qui rassemblent plusieurs sujets dans une expérience de l'Inconscient inaccessible autrement, un ou plusieurs psychanalystes assurent les conditions d'un travail psychanalytique en groupe, avec des couples et des familles, avec des équipes de travail au sein d'institutions

écrit René Kaës avant d'ajouter que « ces extensions ont été et demeurent une condition du développement de la psychanalyse, mais [qu']elles ont suscité réticences et résistances » (2015, p. 27).

Pour aller plus loin il nous faudrait entrer dans le vif débat de la psychanalyse appliquée versus l'application de la psychanalyse. Ici et maintenant je me limiterai à orienter la discussion sur l'impératif pour le clinicien engagé auprès d'équipes instituées de penser ses interventions non pas exclusivement par le prisme de la relation transféro-contre-transferentielle entres des sujets mais bien en prenant en considération les processus complexes d'identification au dispositif et d'emboîtement des dispositifs.

 

Le complexe de Dante

Pour illustrer ce point et pour conclure, je voudrais essayer de formuler une idée apparue en travaillant avec ces professionnels autour des situations de ces jeunes gens en exils scolaires, entendus comme des répétitions d'exils familiaux. Je soumets donc à la réflexion et à la sagacité du lecteur cet emboîtement de l'exil et de l'exclusion entrevu par ce qu'avec beaucoup d'ambition je propose de nommer le complexe de Dante.

Dans la Divine Comédie, Dante (1472) fait le récit d'une vision du monde surnaturel. Accompagné par le poète Virgile, puis par la belle Béatrice, Dante est admis à contempler les supplices des damnés dans l'Enfer, l'état des âmes dans le Purgatoire, les joies célestes des justes dans le Paradis. Il est confronté à de fortes émotions et c'est bien souvent dans une forme de refoulement qu'il tombe, comme inanimé, à chaque passage vers un cercle postérieur. Après avoir erré Dante est en Exil. Il n'est pas à sa place dans cet autre monde. Il ne peut pas véritablement s'identifier aux damnés et pourtant il ne cesse de le faire. Il a besoin d'être accompagné pour effectuer ce voyage et trouver sa place.

Au sujet de cette épopée, il écrira : « Le sujet, si on le considère littéralement, est l'état des âmes après la mort [...] ; si on le considère allégoriquement, c'est l'homme soumis, en tant qu'être libre, à la justice qui le récompense ou le punit suivant ses bonnes ou ses mauvaises actions ».

Pour Olivier Douville (2007), l'errance est un exil sans métamorphose subjective ou un voyage sans but. Je le ne crois pas, pas même dans les cas de psychose grave, dont les symptômes délirants fournissent encore l'espoir d'une tentative d'inscription. Ce que je postule c'est que, si une part d'errance était mieux tolérée dans un espace contenant institutionnel, les errances graves, pathologiques, seraient moins fréquentes et surtout moins violemment ressenties par les représentants des institutions éducatives.

L'errance, comme défaut d'inscription, renvoie au concept de mésinscription d'Alain-Noël Henri (Omay & Gaillard, 2009). Ce concept vise, selon son auteur, ce que l'on appelle communément la déviance et désigne le fait que le déviant n'est pas déviant en lui-même mais qu'il le devient

lorsqu'au gré des mutations dans l'organisation symbolique d'une société, il se trouve érigé en emblème de la terreur et de l'horreur, ou simplement du trouble, qui s'attachent aux représentations refoulées (Henri, 2009, p. 57).

Il y a donc une foule très hétérogène de sujets qui seront reconnus ou se reconnaîtront dans ce concept de mésinscription : les fous, les malades, les pauvres, les marginaux de tous ordres, les jeunes... Ce qu'il y a de commun entre ces mésinscrits c'est l'effet violent qu'ils produisent dans l'ordre de la représentation. Ces mésinscrits sont mal inscrits mais ne sont pas désinscrits ou non-inscrits dans l'espace social, ils laissent des traces.

Pour Douville (2007), l'errance est le signe alarmant de la coïncidence entre présence et apparence. Je propose d'envisager au contraire l'errance sous l'angle de l'apparition sur la sphère sociale, c'est-à-dire depuis un questionnement ayant trait au subjectif, au social et au politique. L'adolescent trouvant à actualiser sa place et son positionnement dans chacune de ces catégories, vient à son tour les questionner autant qu'elles le questionnent, les exigences de réponses n'étant évidemment pas d'un registre comparable, de sorte que les questions restent le plus souvent sans réponses. Ce complexe de Dante semble alors heuristique parce qu'il ne nous permet pas de trancher parfaitement sur nos identifications : Qui sont les damnés ? Qui est Dante ? Qui est Virgile ? Et Béatrice ? Du coup, ce complexe nous enjoint à penser les mécanismes d'emboîtements et la complexité des processus identificatoires dans les situations d'exils.

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Références

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Reçu en decémbre 2019 – Accepté en mars 2020.

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